Master Franchisé
La master franchise est une stratégie de développement hors du territoire national . Lorsque qu'une enseigne souhaite s'implanter à l'étranger, elle peut avoir recours à ce type de contrat. Concrètement, elle donne l'exclusivité du développement en franchise à un master franchisé dans un espace géographique défini.
Pour que le master franchisé ait le temps nécessaire d'exploiter, de développer et d'amortir ses investissement, la durée d'un contrat est souvent fixé à 10 ans.
L'avantage du développement en master franchise réside dans le fait de pouvoir tester un marché étranger. En effet, en collaborant avec entrepreneur local connaissant les spécificités du pays choisi, le franchisé bénéficie d'une adaptation de son concept au marché local.
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Master franchise : signer son contrat en connaissance de cause
Vous êtes candidat à la franchise et désirez rejoindre une enseigne née à l’étranger ? Plusieurs cas de figure se présentent à vous. Vous pouvez signer votre contrat avec une filiale de la maison-mère – ce qui est aujourd’hui le cas le plus fréquent en France -, ou alors décider de signer un contrat avec le master-franchisé (national ou régional) ? Dans ce deuxième cas, l’implantation du concept à l’étranger nécessite pour le franchiseur-créateur de faire appel à un « intermédiaire », un homme de terrain chargé d’adapter, si besoin, la franchise à son nouveau marché national, en procédant aux investissements et aux ajustements nécessaires pour assurer le succès de l’entreprise.
Comment mettre toutes les chances de son côté, quels sont les profils les plus à même de réussir, et de quelle autonomie jouit le master, entre le franchiseur d’une part et ses franchisés d’autre part ? C’est pour répondre à ces questions que nous avons interviewé Cristelle Albaric, avocate au cabinet Simon Associés, spécialiste de ces problématiques et auteur d’ouvrages sur la franchise
Le passage d’un pays à un autre des concepts de franchise via un master franchise concerne-t-il plus spécifiquement les grandes marques connues, ou bien cela touche-t-il les enseignes de taille plus modeste également ?
L’important n’est pas de viser la taille ou la notoriété, mais de trouver un concept reconnu jouissant d’une réussite commerciale et surtout qui réponde à un réel besoin du marché visé. Les franchises françaises ont des concepts qui intéressent d’autres pays. La preuve, 30 % des enseignes françaises sont exportatrices alors qu’il n’existe que 15 % de franchiseurs étrangers en France.
Concernant le développement international, et lorsque le franchiseur opte pour un développement via la master franchise, il est primordial de choisir un master-franchisé connaissant parfaitement son marché local, et qui ait le support nécessaire pour assurer un développement raisonné de la marque sur son territoire.
Master franchises : comment les enseignes parviennent-elles à conserver une unité et à s’adapter aux différentes législations des pays dans lesquels elles s’implantent ?
Lorsque l’on vise un nouveau pays, il est indispensable d’étudier la réglementation du territoire cible dans le secteur d’activité concerné et bien sûr de s’assurer de ne pas contrevenir aux règles d’ordre public locales.
De plus, pour que l’opération puisse connaître un succès commercial, il est parfois nécessaire d’adapter son savoir faire aux particularités locales et notamment culturelles, sans toutefois le dénaturer, sans le vider de son essence et des critères constitutifs de sa réussite. Lorsque le concept n’est pas transposable en l’état, par exemple si la culture de la zone cible est trop éloignée de celle du pays d’origine, alors il convient d’identifier les adaptations nécessaires à l’intégrabilité du savoir-faire sur le nouveau marché. Choisir un master-franchisé issu du pays visé permet de s’assurer les meilleures chances d’intégration et de réussite, la mise en commun des connaissances du franchiseur et de son master constituant un atout essentiel. Se pose alors la question du seuil d’adaptation, du seuil acceptable de modification, visant à concilier l’homogénéité du concept tout en l’adaptant. Cette étape est à la fois essentielle (car le succès commercial en dépend) et délicate, car en le modifiant, on porte par définition atteinte à un système ayant déjà fait ses preuves et on risque d’altérer l’efficacité du modèle économique du concept d’origine.
Qui décide au final, le master franchisé ou bien le franchiseur ?
En fonction du rôle conféré au master-franchisé (pour une analyse de la qualification juridique du contrat liant le franchiseur au master franchisé, voir la Thèse de Cristelle Albaric : La Franchise Principale - Université de Montpellier, 1998) ce dernier peut avoir un rôle plus ou moins important impliquant une collaboration étroite avec le franchiseur dans la tâche d’adaptation du système.
Le master franchisé intervenant dans le processus d’adaptation de la franchise constitue une aide pour le franchiseur. A ce titre, le master franchisé doit disposer d’un réel pouvoir de proposition, même si c’est au franchiseur que doit revenir le dernier mot afin d’assurer la cohérence et la maîtrise du réseau. Il s’agit alors d’un subtil équilibre à trouver, une franchise pouvant absorber des modifications tant qu’elles restent marginales et ne remettent pas en cause les fondamentaux.
Citons par exemple Mc Donald’s, qui exploite ses restaurants de manière identique sur tous ses marchés, selon ses quatre critères de base que sont quality, service, clealiness et value (qualité, service, hygiène et valeur). Pour autant, il existe des spécificités locales incontournables, dont il faut impérativement tenir compte. Ainsi, la suppression sur le marché indien de la viande de bœuf dans les menus de la chaîne de fast-food relève d’une adaptation certes cruciale pour ce marché mais néanmoins marginale au regard du concept de l’enseigne.
Ces modifications du savoir faire soulèvent la question de la réservation juridique du savoir-faire modifié. Les « grant back clauses » ou « clauses de cession en retour » permettent au franchiseur de s’assurer de la réservation des adaptations.
En cas de défaillance de la maison-mère, que devient le master franchisé ?
Les réponses varient selon qu’il s’agit de la défaillance du master franchisé ou bien de celle du franchiseur.
Ainsi, la responsabilité du franchiseur peut être engagée vis-à-vis des franchisés en cas de défaillance du master. En France on a connu le cas de l’enseigne d’origine néo-zélandaise Fastway, spécialisé dans le transport de petits colis, dont deux master-franchisés ont été mis en liquidation judiciaire. Dans ce cas de figure il est prudent d’avoir prévu en amont une clause qui implique que le franchiseur se porte garant des engagements du master franchisé.
Dans l’hypothèse où le franchiseur est lui-même défaillant, la question est de savoir s’il s’agit d’une « simple » inexécution des engagements, auquel cas le master franchisé / franchisé pourra par exemple saisir les tribunaux pour obtenir, le cas échéant, une exécution forcée. S’il y a une procédure collective engagée contre le franchiseur se posent deux cas de figure selon que le franchiseur peut être redressé ou pas. Le master franchisé peut alors saisir le tribunal pour obtenir le prononcé de la résiliation du contrat et s’en libérer définitivement pour autant que le contrat soit soumis au droit français.
Justement, dans ces litiges entre les franchisés et leur master, est-ce la juridiction du pays hôte ou celle du pays d’origine qui s’applique ?
Dans un souci de clarté il est recommandé que le contrat liant le master franchisé et les franchisés stipule clairement quel est le droit applicable et la juridiction compétente. A défaut, et dans l’hypothèse où le contrat est passé entre des sociétés de nationalités différentes, on est en présence d’un contrat international. La jurisprudence française reconnaît depuis longtemps, que la loi applicable au contrat international est celle désignée par les parties et à défaut, celle avec laquelle le contrat présente les liens les plus étroits. Pour établir ces liens, il est souvent fait recours au lieu d’exécution de la prestation caractéristique.
Y a-t-il des secteurs d’activité plus favorables à la master franchise que d‘autres ?
La master-franchise est un système de distribution. Le secteur d’activité ne favorise en rien le développement de la master franchise. Il y a en France des secteurs traditionnels par lesquels la franchise a commencé à se développer il y a plus de 40 ans maintenant Ainsi, 60% du chiffre d’affaires total de la franchise en France se concentre dans 5 secteurs d’activité qui sont l’alimentation, la coiffure, l’équipement de la personne, l’équipement de la maison et l’hôtellerie. Et l’on retrouve ces secteurs d’activité en tête des master-franchises, fort logiquement. Bien entendu de nouveaux secteurs sont en progression, secteurs qui s’appuient sur les nouvelles tendances de notre société.
Comme pour une franchise nationale, le lancement d’une master franchise dans un nouveau pays doit-il être testé via un site pilote ?
En cas de développement d’une master franchise en France par un franchiseur étranger, il n’existe d’obligation légale de tester le concept via un site-pilote en, France. Pour autant, le document d’information précontractuelle (DIP) que le master franchisé devra remettre à son premier franchisé français, précisera e.g. que la société du master franchisé a été créée afin de développer le réseau en France et qu’à ce jour le réseau ne compte aucun établissement sous franchise en France. Dès que le premier franchisé aura ouvert, le DIP sera remis à jour pour mentionner cette entrée dans le réseau et le démarrage effectif de l’activité dans le pays.
Il peut également arriver que le franchiseur requière l’ouverture d’un site pilote par le master afin précisément de tester le concept et d’identifier les adaptations nécessaires pour une intégration sur le nouveau marché.
Pour conclure, quel est le profil du master franchisé ?
Le master franchisé a un double profil : il doit tout d’abord avoir l’étoffe d’un chef d’entreprise (puisqu’il doit savoir manager une large équipe), et dans le même temps, il doit être en mesure d’accepter les contraintes caractéristiques du réseau. Il lui faut donc bien appréhender l’étendue de son rôle, et bien identifier le potentiel de son territoire, en définissant avec le franchiseur un plan de développement précis et chiffré, étape nécessaire pour assurer le succès du futur réseau sur son nouveau marché.
En 2011, l’Hexagone comptait 1.569 réseaux de franchise pour 62.041 franchisés, réalisant 49.24 milliards d’euros de chiffre d’affaires selon les derniers chiffres de la Fédération Française de la Franchise. La France a su exporter ses marques puisqu’on estime que 30% de nos enseignes sont présentes à l’étranger, dont 24% se développent principalement en Europe, tandis que seulement 15% des chaînes présentes dans l’Hexagone sont issues de concepts étrangers. Les situations sont en réalité assez disparates en fonction des nations : alors que les Etats-Unis et la France ont démarré la franchise il y a 40 ans, et ont donc un rythme de développement de ce type de commerce assez mesuré, d’autres affichent des progressions spectaculaires, comme c’est le cas du Brésil, où sur les dix dernières années, le nombre de magasins franchisés est passé de 600 en 2002 à plus de 1.800 aujourd’hui, sans compter la Chine qui aujourd’hui avec plus de 4.500 réseaux est le numéro un mondial en terme de nombre de réseaux.