Interview franchise Brioche Dorée
Un entretien avec Louis Le Duff, capital humain une réussite dans les affaires
Louis Le Duff - le
Il n’est pas facile de présenter Louis Le Duff en quelques mots. Bien que très discret sur sa vie privée, on sait que la mer fait partie de ses passions (comment ne l’aimerait-t-il pas, sa maman s’appelle Kersauson et il est né dans la région de Roscoff). Sportif pratiquant le vélo, il est également féru d’histoire. Tout ce qu’il entreprend, il le fait avec passion. Louis Le Duff entraine ses troupes, presque 10.000 collaborateurs, depuis plus de 30 ans. Il a formé des équipes, passionnées comme lui, autour d’un projet, de valeurs d’entreprises, de challenges. Les plus anciens de ses collaborateurs sont encore là, avec 25 et 30 ans de maison, signe incontestable des qualités humaines qui prévalent dans le management des équipes.
Louis Le Duff cite volontiers cette phrase d’Henry Ford : « prenez mes usines, mon argent, mais laissez-moi mes hommes et je rebâtirai mon empire… »
Louis Le Duff a quitte l’école vers 14 ans. Il débute sa vie professionnelle à 14 / 15 ans, comme vendeur de produits maraichers, il reprend ses études et devient professeur d’université puis a créé l’un des principaux groupes de restauration qui compte 700 restaurants et Boulangeries. Il réalise 740 millions d’€ de chiffre d’affaires.
Grand professionnel de la franchise, il en a fait le sujet de sa thèse de doctorat. Pour Louis Le Duff, la franchise est un excellent moyen de lancer son entreprise. Encore faut-il être animé d’un esprit d’entrepreneur.
Yves Sassi : Louis Le Duff, vous écrivez dans votre livre que vous avez quitté l’école à 14 ans pour travailler dans l’entreprise de votre père. Quel fut votre parcours, quelles ambitions entreteniez vous pour parvenir à construire votre groupe de restauration ?
Louis Le Duff : Je suis né dans une famille de petits entrepreneurs. Epiciers, assureurs, agriculteurs, maraichers, notaires… Mes oncles et mon père étaient des « petits » entrepreneurs, tous à leur compte, propriétaire de leur entreprise.
Le goût du travail, le sens de l’entreprise faisaient partie de l’éducation. Ils avaient l’esprit d’entreprise, j’ai du en hériter. J’aimais ce qu’ils faisaient. Comme tous les gamins qui ont reçu beaucoup d’amour, j’ai naturellement aimé ce que faisaient mes parents… Lorsque j’avais 15 ans, mon père m’a dit : « tu vas vendre tous les produits de l’exploitation ». J’avais la peur au ventre de rencontrer des acheteurs de 30, 40 ans, acheteurs rompus à toutes les ficelles de la profession. Papa disait à son entourage : « Je sais que Louis va se faire avoir, cela va me couter 10 % de mon chiffre d’affaires, mais c’est le meilleur investissement que je puisse faire pour lui, pour former un jeune de 15 ans » !
Comment avez-vous lancé votre entreprise ?
J’ai repris mes études 2 ans plus tard. Bepc à 18 ans, Bac à 21, puis Sup de Co à 25, MBA et Doctorat en économie… Je suis parti aux USA ou j’ai compris que des changements de mode de vie allaient se produire en France, à l’instar de ce qui s’était passé aux USA., notamment en matière alimentaire.
En revenant en France, je suis devenu prof de fac… pour avoir du temps libre pour lancer mon projet d’entreprise.
Je voulais lancer un nouveau concept de restauration rapide de tradition française. Le principe était de regrouper sous un même toit le pain du boulanger, le beurre du crémier, le jambon du charcutier et la salade du marchand de fruits et légumes, la boisson …, tout cela pour offrir un bon repas à nos clients. Mais l’investissement était colossal, je n’avais pas un sous en poche. Alors, pour démarrer, j’ai gardé mon emploi de professeur et j’ai créé une entreprise de restauration pour cantines, je ne prenais aucun salaire. Ce n’était pas très rentable, mais avec une trésorerie très favorable. 2 ans plus tard, en 1976, j’ai pu ouvrir ma première Brioche Dorée !
Imaginez, mon premier restaurant a couté 11 années de salaire d’un prof ! Quand on n’a pas d’argent, il faut avoir des idées. C’est ce que je dis aux jeunes qui veulent se lancer, mais qui se plaignent de ne pas avoir les moyens financiers.
Vous parlez souvent de vos collaborateurs, de l’importance des équipes. Vous estimez que le capital humain est primordial dans la réussite de vos affaires ?
Diriger une entreprise, c’est mener à bien un projet, c’est motiver des collaborateurs autour d’une passion, d’objectifs. L’argent n’a jamais été, ni pour moi, ni pour mes équipes, un moteur. L’argent n’est que le carburant.
Nous sommes tellement passionnés que le plaisir du travail est supérieur aux difficultés que l’on peut rencontrer dans notre vie professionnelle.
Ce qui fait que les gens sont fidèles à une entreprise ? Il y a un leader, des objectifs communs, une passion d’entreprendre. Et puis, nous étions sur une vague « on the stream ». Nous avancions aussi vite que le marché ! Bien évidemment, nous avons connu les maladies infantiles, puis celles de l’adolescence et de l’âge adulte. Il n’y a jamais rien d’acquis. Moins que jamais. Autrefois, les enfants pouvaient hériter de la petite entreprise familiale et la conduire avec plus ou moins de talent, sans trop risquer la faillite. Maintenant, c’est impossible, sans talent, sans volonté, sans passion, pas de possibilité de résister.
Je crois également que plus que l’intelligence, plus que le talent et même plus que le géni, l’excellence nait de l’effort d’une équipe soudée. Et puis pour rester indépendant, pour poursuivre son développement, il faut toujours avoir un cash-flow supérieur à son égo. Dès que vous prenez la grosse tête, vous êtes perdu.
Louis Le Duff, aujourd’hui, quelles sont vos ambitions, vos motivations ?
Outre le développement du groupe, ma passion est de pousser les jeunes à réaliser leurs projets. Je détiens des participations dans de nombreuses entreprises créées par des jeunes qui souhaitaient se lancer, mais n’en avaient pas les moyens. Dès que les bénéfices le permettent, ils s’émancipent, reprennent leur liberté financière. Récemment, j’ai aidé un jeune de 25 ans à créer une cuisine centrale à Hong Kong. Jeune diplômé de Sup de Co Angers, il travaille un an dans le groupe et maintenant, il est indépendant à Hong Kong. C’est un conquérant, je dirais un corsaire breton. Il a du talent. Si vous connaissez des jeunes talentueux, pour lancer des projets de même ordre en Europe, au Japon, aux USA, qu’ils viennent, je trouverai les moyens de les y aider.
Nous jouons le rôle du banquier, avec en plus, l’expérience, notamment en matière d’emplacement, de puissance d’achat, de logistique, de recherche et développement, l’expérience du management, de la gestion, du droit… en un mot, la franchise ! Vous savez, la franchise, c’est un métier. Il faut être conscient que 52% de ceux qui veulent créer une entreprise seuls échouent durant les 5 premières années. Choisissez un bon parrain et vous avez 10 fois plus de chances de réussir que d’échouer.
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