Franchiseurs, mettez en place votre politique RSE sans tarder !

Sujet à la mode depuis quelques années, la Responsabilité Sociétale des Entreprises, ou RSE, fait parler d’elle partout, dans la presse comme dans les réseaux d’entrepreneurs, et jusqu’aux instances politiques, qui travaillent à renforcer son cadre législatif. Malgré tout, elle est encore bien peu mise au cœur des priorités des entreprises. C’est particulièrement vrai dans les réseaux de franchise, globalement encore timides sur la question.

La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) est devenue une composante essentielle de la réussite commerciale. Pour les réseaux de franchise, l'adoption d'une politique RSE va bien au-delà d'une simple tendance : c'est un impératif stratégique. En effet, dans un environnement où la conscience sociale et environnementale des consommateurs est en constante évolution, les réseaux de franchise doivent s'adapter pour rester compétitifs et durables. Et les franchiseurs ont tout intérêt à voir la RSE comme une source d’opportunités plutôt que comme une contrainte.

La RSE, un incontournable pour survivre

Bien entendu, le contexte actuel n’est pas forcément très favorable. Entre l’inflation, une consommation souvent en berne et des perspectives économiques floues, les entreprises ont plutôt tendance à se concentrer sur l’opérationnel et à tenter de juguler la crise, à leur niveau. Une situation compliquée qui affecte directement le moral des dirigeants d’entreprise, qui chutait fin 2023 à un niveau encore plus bas que le précédent, après une année déjà très éprouvante, comme le rapporte un sondage OpinionWay pour CCI France, la Tribune et LCI.

Dans les réseaux de franchise, ce n’est guère différent, et “c’est le pragmatisme qui prend souvent le dessus, commente Alexandre Chusseau, directeur de l’agence de marketing digital et communication B52 et expert FFF. Certains franchiseurs ont du mal à voir l’intérêt immédiat de se concentrer sur la RSE, quand d’autres points semblent plus urgents.”

Mais attention à ce que ce retard ne s’accumule pas trop, jusqu’à créer un réel écart avec des acteurs plus avancés sur ces sujets. “Car il est certain que la RSE sera un incontournable de ces prochaines années”, assure Dominique Royet, directrice de l’agence Hyssop, mandatée par la FFF pour accompagner les réseaux dans la mise en place de leur politique RSE.

A partir de 2026, toutes les entreprises européennes de plus de 250 salariés devront publier un bilan ESG de leur activité

D’autant que la législation devrait devenir de plus en plus contraignante en la matière. Dernier changement en date, qui bouleversera l’organisation de nombreuses entreprises : l’entrée en vigueur d’une nouvelle directive européenne, la CSRD. “A partir de 2026, toutes les entreprises européennes de plus de 250 salariés devront publier un bilan ESG de leur activité, dans lequel elles identifieront les risques de l’entreprise en matière de RSE et reporter ce qu’elles font pour limiter ces risques”, rappelle Dominique Royet.

Quand la franchise se mettent à la RSE

D'ailleurs, dans l’esprit de tous, l’importance des enjeux RSE est bien présente. Aussi bien sur les questions environnementales, avec le changement climatique et la perte de biodiversité qui s’accélèrent, que sur les sujets qui touchent directement l’humain, comme l’inclusion, l’égalité hommes-femmes et les conditions de travail en général. Et certains réseaux commencent à se positionner.

Jeff de Bruges travaille depuis trois ans sur ces questions, et s'est doté d’un comité de pilotage RSE. Le groupe de cuisinistes FBD (Ixina, Cuisine Plus, Cuisines Références et Vanden Borre Kitchen), de son côté, a annoncé que 2024 serait l’année du déploiement de sa nouvelle stratégie RSE. “Après une phase d’audit menée en 2023 et la création d’un comité RSE, nous avons travaillé à la définition d’un plan d’actions qui, parmi ses grands axes, s’est fixé de développer et promouvoir la culture RSE en interne afin que celle-ci tienne une place centrale dans les prises de décision.”

Les réseaux plus matures sont souvent plus avancés dans leur stratégie RSE

“Les réseaux plus matures sont souvent plus avancés dans leur stratégie RSE que des réseaux plus jeunes. Et cela se comprend : ils sont plus structurés, et mieux à même de mettre en place des actions adéquates”, poursuit Alexandre Chusseau. Ce faisant, ils servent d’exemple aux autres réseaux de franchise, et peuvent les encourager à suivre une voie similaire.

Arguments marketing et économiques

Il faut dire que les arguments en faveur de la mise en place d’une stratégie RSE sont légion. Ils sont d’abord d’ordre marketing. “De plus en plus, le consommateur va choisir des réseaux responsables au détriment d’autres, c’est inévitable”, constate Emmanuelle Vaillant, consultante experte ingénierie et développement, Franchise Management. Et cela a déjà commencé : en 2023, près de 8 Français sur 10 déclaraient se mobiliser en faveur d’une consommation plus responsable et avoir changé certaines pratiques, d’après l’Ademe.

Les incitations sont aussi économiques : en plus de booster les ventes, la RSE peut aider à réaliser des économies. Et les leviers sur lesquels jouer sont nombreux, à commencer par la consommation énergétique de façon générale. En mettant en place des solutions, parfois très simples, il est possible de réduire ses dépenses, et donc d’améliorer son empreinte carbone tout en allégeant ses factures.

Le groupe Lapeyre, par exemple, a mis en place différentes actions en ce sens, comme des équipements plus récents et moins énergivores et le passage à un éclairage 100 LED au sein de son usine Cordier. Et les résultats sont probants : “En un an, nous avons réduit de 20 % notre consommation d’électricité”, sefélicite le directeur de l’usine, Rémi Seynhaeve.

Bien d’autres leviers existent, comme le sourcing des produits, avec des approvisionnements plus locaux et plus naturels, ou encore une logistique optimisée pour limiter les déplacements lointains et inutiles.

Attirer et fidéliser des talents avec la RSE

A l’heure où la grande majorité des entreprises peinent à recruter, la RSE s’impose également comme un allié de choix dans la valorisation de la marque employeur. “Aujourd’hui, le salaire n’est plus la seule préoccupation. Les candidats veulent trouver du sens dans ce qu’ils font et pour qui ils le font”, commente Dominique Royet.

Outil d’attraction des talents, la RSE est également un argument fort pour les fidéliser, et inciter les salariés à rester en poste, tout en continuant à s’impliquer pour leur entreprise.

En effet, d’après une étude Kantar réalisée en 2020 pour le Medef, “79 % des salariés qui travaillent dans une entreprise engagée en matière de RSE se voient toujours y travailler au cours des trois prochaines années”. C'est 11 points de plus que ceux qui travaillent dans une entreprise sans politique RSE.

Recruter (aussi) des franchisés

Il n’y a pas que le recrutement de salariés en interne qui intéresse les franchiseurs. Pour faire grandir leur réseau, ils doivent aussi attirer de nouveaux franchisés. Et là aussi, la tâche n’est pas aisée. Alors, la RSE peut s’avérer être un atout distinctif.

“On sent comme un frémissement de la part des candidats à la franchise, qui sont de plus en plus nombreux à poser des questions en ce sens lorsqu’ils échangent avec le franchiseur, note d’ailleurs Emmanuelle Vaillant. C’est vrai chez les candidats plus jeunes, mais aussi chez les moins jeunes, qui voient dans les engagements du réseau une garantie de pérennité du concept.”

Pour 68 % des visiteurs à Franchise Expo (édition 2021), la RSE est un critère dans le choix de leur franchise, et 7 visiteurs sur 10 estiment qu’une enseigne ayant une démarche RSE peut être un facteur différenciant pour aux (source : sondage Hyssop réalisé en septembre 2021).

“Mettre en place une politique RSE, c’est donner une vision à son réseau. Et cela contribue aussi aux devoirs du franchiseur, qui se doit d’innover et de faire évoluer son concept et son savoir-faire pour qu’il perdure”, rappelle Emmanuelle Vaillant.

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Journaliste

Jennifer Matas

Ashil

Journaliste depuis 2013, diplômée de Sciences Po Grenoble et de Grenoble Ecole de Management, Jennifer Matas travaille avec l’agence Ashil ainsi qu’avec différentes rédactions spécialisées dans l'entrepreneuriat et l’économie. Depuis plusieurs années, elle suit l’actualité des réseaux (franchise, licence de marque, concession, affiliation, coopérative...) et a animé des conférences à Franchise Expo.