YellowKorner présente les photographies de Ben Hupfer : « Regards croisés sur Dubaï et Tokyo ».
Depuis plusieurs années, le photographe allemand Ben Hupfer consacre sa recherche artistique à la représentation de mégalopoles. Après sa série new yorkaise, déjà présente dans les collections YellowKorner, Hupfer photographie Dubaï et Tokyo. À son habitude, l’artiste refuse d’en donner une image convenue et donne à voir un aspect méconnu de ces villes.
Les deux photographies représentant la ville de Tokyo décontenancent le spectateur. Il s’agit de vues nocturnes d’une seule et même rue. Mais si les deux photographies sont prises du même endroit, les deux angles sont différents. Dans cet espace, deux mondes opposés cohabitent à quelques mètres : les immeubles de bureaux modernes et un temple traditionnel. La scène frappe par son immobilisme. Prise de nuit en pause longue, le paysage est vidé de ses habitants. Hupfer éloigne radicalement sa vision de Tokyo des représentations habituelles d’une mégalopole en constante effervescence. La route puissamment éclairée scinde l’image en deux. L’absence d’horizon crée un sentiment d’enfermement. La vision en contreplongée s’apparente à celle de la caméra de vidéosurveillance qui permet une observation précise et minutieuse d’une zone circonscrite. L’artiste renforce cette impression en retravaillant les couleurs en postproduction.
Pour la série consacrée à Dubaï, Ben Hupfer détourne son regard de la cité ultramoderne, de son luxe et de son effervescence. Il emmène le spectateur aux confins de la ville, là où le désert commence.
Dubaï perd de sa réalité et devient un assemblage de tours, d’hôtels évoquant les maquettes en 3D des promoteurs immobiliers. À quelques kilomètres du centre, les prémisses des constrictions nous rappellent que la ville a été construite dans un no man’s land, presque arrachée au désert. Ben Hupfer la qualifie de «gigantesque oasis de métal et de béton perdu au milieu de nulle part ». L’horizon poussiéreux et ensablé semble voilé. Le traitement coloriste en postproduction reprend les codes couleurs du désert. Il donne aussi un effet rétro au cliché qui contraste avec la modernité et la richesse de la ville.
New York, Dubaï ou Tokyo sont des villes mythiques. L’imagerie qui leur est consacrée nourrit l’imaginaire collectif. Il en résulte une iconographie pléthorique, consensuelle et jamais renouvelée. Prenant le contrepied de cette surreprésentation, Ben Hupfer se garde de tomber dans le lieu commun pour nous donner une vision plus subtile de la ville.