Interview franchise Happy Troc
Interview de Jean-Pierre Boudier, de la franchise Troc.com
Jean-Pierre Boudier - le
Peut-on être et avoir été ? A cette question, le fondateur de Troc.com a déjà répondu par l’affirmative dans le passé, lorsque de chômeur longue durée il est devenu le fondateur de Troc.com, le réseau de franchise de dépôt-vente devenu leader en Europe. Jean-Pierre Boudier, puisque c’est de lui qu’il s’agit, revient sur le devant de la scène une nouvelle fois, en reprenant les commandes de sa société après quelques années à la retraite. Il s’explique sans langue de bois pour l’Observatoire sur les raisons de ce retour très médiatisé.
Rodolphe Hatchadourian : Vous avez officialisé en ce début 2011 votre retour aux commandes de Troc.com. Quelles sont les raisons qui ont présidé à ce choix ?
Jean-Pierre Boudier : Une franchise, c’est une chimie particulière et dans de nombreux réseaux, il s’est avéré difficile de passer le flambeau du fondateur à une seconde génération exploitant le concept. Lorsqu’à mon départ en 2002, Georges Yana, alors master-franchisé pour la Belgique, a été désigné comme dirigeant du réseau, nous savions que cette situation était provisoire. Quand M. Yana a dû quitter son poste pour des raisons personnelles, nous avons dû réagir dans l’urgence. Son successeur a été nommé alors que la crise faisait sentir ses premiers effets : les chiffres d’affaires de l’enseigne ont commencé à montrer des signes d’essoufflement... C’est alors que je suis revenu aux affaires, avant tout afin de rasséréner le réseau et lui donner une nouvelle feuille de route.
Troc.com demeure le numéro un des réseaux de dépôts-ventes en Europe. Comment expliquez-vous ce succès ?
Il est dû avant tout à la forte culture de la franchise qui nous caractérise, et qui nous a permis de faire participer et d’émuler l’ensemble des entrepreneurs qui nous ont rejoint au fil des années. Ainsi, nous avons une trentaine de personnes au siège, chargées d’animer le réseau en mettant en place sans cesse des événements fédérateurs : organisation de congrès, de conventions, de commissions… l’idée est de rester à l’écoute de l’ensemble des membres du réseau. Il est d’ailleurs intéressant de constater que très peu de personnes nous ont quitté car notre marque cultive un véritable esprit de famille. Nous n’avons de plus aucun concurrent structuré à l’échelle européenne, puisque le marché du dépôt-vente est constitué majoritairement d’’indépendants.
Après des années marquant un fort développement, Troc.com a connu un certain ralentissement depuis deux ans. La crise est-elle en cause ?
La crise a en effet joué un grand rôle dans le ralentissement observé, qui a touché l’ensemble des consommateurs et notre secteur par ricochet, car contrairement à ce qu’on pourrait penser, notre business fonctionne bien mieux en dehors des périodes de crise, au moment où les clients sont prêts à acheter du neuf, se tournant vers nous pour revendre leur matériel usagé. Il faut garder en tête que 52% de nos vendeurs sont aussi des acheteurs.
Nous avons également été confrontés à un changement de mode de consommation de nos clients, qui ont quelque peu délaissé le secteur des meubles (qui constituait jusqu’ici le gros de notre activité) pour privilégier les achats de petit matériel, de hi-tech, et il est vrai que nous n’avions pas su anticiper ce mouvement. Je tiens à préciser cependant que la baisse du chiffre d’affaires de ces dernières années a été somme tout mesurée, de l’ordre de 3% sur une année, et les choses étaient donc loin d’être irréversibles.
Quels sont les leviers de développement que vous comptez actionner pour que Troc.com renoue durablement avec la croissance ?
Nous souhaitons donner plus d’espace et mettre en scène les rayons qui fonctionnent le mieux. Je pense aux biens culturels, au petit électroménager, aux téléviseurs, à l’informatique, aux jeux vidéo… Nous allons par exemple créer de véritables coins librairie, allant jusqu’à embaucher des vendeurs spécialisés. Nous débutons ces transformations par notre magasin d’Avignon, où 40 m² seront entièrement consacrés aux livres. Cet espace sera gagné sur nos rayons mobiliers, sans pour autant que nous en diminuions le nombre d’articles, grâce à un ingénieux système de palettisation. A la demande de nos clients, nous allons également proposer des meubles de cuisine neufs, en nous alimentant auprès de fournisseurs très performants au niveau du prix. Ces actions ne constituent que quelques pistes parmi bien d’autres...
Vous avez racheté La Trocante en 2010. Comment se passe l’intégration des magasins et quelles synergies comptez-vous créer entre les deux réseaux ?
Nos modèles sont quelque peu différents, et nous comptons donc rendre nos deux réseaux complémentaires, afin de toucher un spectre de clientèle le plus large possible. Nous conserverons la marque La Trocante, qui se développe sur des surfaces plus petites que Troc.com, et qui peut donc intéresser des investisseurs disposant de finances plus réduites.
Nous souhaitons accentuer la part de l’achat-cash pour nos deux enseignes, qui compte à l’heure actuelle pour 50% du chiffre d’affaires de la Trocante, et seulement 20% pour Troc.com.
Depuis 2008, Troc.com a pris un nom aux résonnances résolument « Web ». Quelle est votre stratégie concernant le média internet ?
Troc.com entrera dans une nouvelle phase d’ici quelques semaines, en proposant un système de petites annonces entièrement gratuites. A l’issue d’une période d’un mois, les internautes pourront mettre leur article en vente dans l’un de nos magasins : c’est la réelle alliance du click and mortar. Nous pensons recevoir des centaines de milliers d’annonces, et cela fera autant d’usagers potentiels des magasins franchisés.
Pouvez-vous nous faire un point sur vos projets d’ouverture en France et à l’étranger. Allez-vous succomber à la mode du format réduit de centre-ville qui touche le secteur de l’achat-cash ?
Nous étudions en effet une évolution de nos formats afin de nous adapter à des surfaces moins gourmandes en mètres carrés, car nous souhaitons nous rapprocher des cœurs de ville où nos clients résident.
En ce qui concerne le présent et le futur immédiat, trois ouvertures de Troc.com sont programmées ou réalisées : Lille (ouvert depuis le 20 janvier), Tours dès la mi-avril puis Commercy au mois de mai. Notre dernière Trocante a ouvert en région parisienne, un territoire sur lequel nous souhaitons accroître nos implantations. Hors de nos frontières, nous poursuivons notre conquête en Espagne, avec la récente inauguration de notre unité de Badalona, bientôt suivie de celle de Terrassa.
Quelles qualités recherchez-vous chez vos candidats à la franchise ?
Nous souhaitons avant tout travailler avec des passionnés réellement impliqués dans le développement de leur entreprise et ayant le sens des responsabilités. Troc.com s’intéresse à des personnes venant des horizons les plus divers, car nous fournissons une formation complète tant pour les franchisés que pour le personnel des magasins.
De récentes études ont confirmé le fait que les consommateurs continuent d’orienter leurs achats vers les biens d’occasion. Comment comptez-vous convertir les individus encore rétifs à ce type de comportement ?
Tout simplement parce que nous avons une grande foi dans notre métier : nous pensons réellement œuvrer pour le bien-être général, en permettant à nos clients d’augmenter substantiellement leur pouvoir d’achat. Et nous n’avons plus qu’à faire passer le message en quelque sorte…
Dans une étude IPSOS parue récemment, 71% des sondés déclaraient se sentir mal à l’aise car ils avaient parfois le sentiment de gâcher les ressources de la planète en consommant à outrance : le concept Troc.com leur apporte une réponse, en privilégiant les questions environnementales, dont le poids se fera sentir de manière toujours plus importante dans les années à venir, nous en sommes persuadés.
Propos recueillis par Rodolphe Hatchadourian
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