Dossiers de la franchise

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Actualité Juridique - Mars et Avril 2007

La Lettre de la Franchise
du Cabinet d'avocats Simon Associés

Actualité juridique

Requalification du contrat de franchise en contrat de travail : les nuances apportées par la chambre sociale de la Cour de cassation
Cass. Soc., 22 mars 2007, pourvoi n°05-45.434 (cassation)

On le sait, les ressources – souvent inépuisables – du Code du Travail ont permis l’apparition, il y a quelques années, d’une jurisprudence consacrant la requalification du contrat de franchise en contrat de travail lorsqu’est établie l’existence d’un «lien de subordination» entre le franchiseur et son franchisé.
Ainsi, pour condamner un franchiseur à payer des salaires et indemnités à l’un de ses franchisés et à le garantir au titre des condamnations prononcées au profit des salariés employés par ce dernier, une Cour d'appel (CA Douai 30 septembre 2005, inédit) avait retenu que les circonstances ayant entouré l'entrée du franchisé dans le fonds de commerce et la conclusion d'un contrat de franchise révélaient l’existence d’un tel lien de subordination.

Par arrêt du 22 mars 2007, rendu au visa de l’article L.121-1 du Code du Travail, la Cour de cassation porte un coup d’arrêt à ce raisonnement, trop fréquemment emprunté il est vrai. Elle retient en effet que la circonstance que le contrat de franchise permette au franchiseur d’assumer de nombreuses tâches afférentes à l'exploitation du fonds est en soi insuffisante. La solution est logique car les indications du franchiseur participent le plus souvent du savoir-faire ou de l'assistance que le contrat lui impose de transmettre aux franchisés.

Par exemple, la prévision par le contrat d’un réassort automatique ne caractérise pas une perte de l'autonomie économique du franchisé car, précisément, elle participe de l’exécution normale du contrat de franchise. De même, le franchisé conserve-t-il de toute évidence l’autonomie requise – et ne peut donc invoquer l’existence d’un contrat de travail à son profit – lorsqu’il demeure libre de choisir la quantité de marchandises figurant dans la gamme de produits du franchiseur, de pratiquer un prix autre que celui conseillé, de céder son fonds de commerce et d'embaucher du personnel.
La Cour de cassation rappelle ensuite les deux conditions dont la réunion révèle l’existence d’un «lien de subordination» dans l’exécution par le franchisé de son activité : en premier lieu, le franchiseur doit pouvoir déterminer unilatéralement les conditions de travail du franchisé sinon, à tout le moins, avoir le pouvoir de donner des «ordres» ou des «directives» ; en second lieu, le franchiseur doit pouvoir sanctionner le franchisé pour le cas où il ne respecterait pas de telles instructions.


Tout est donc dans la mesure.

Voir aussi sur cette question :
Numéro spécial, Les Petites Affiches, 9 novembre 2006, Le contrat de franchise : un an d’actualité, §§. 15-17.




Résiliation d’un contrat de master franchise pour dol imputable au master franchisé
Cass. com., 3 avril 2007, pourvoi n°05-17.168

Lors de la phase des pourparlers précédant la signature d’un contrat de master franchise, les parties se doivent d’agir de bonne foi l’une envers l’autre. Ainsi, commet une faute le master franchisé ayant faussement affirmé au master franchiseur être libre de tout engagement au regard des autres fonds de commerce concurrents qu’il exploitait auparavant sous une autre enseigne. Cette faute peut être dolosive dès lors que le contrat de master franchise comporte une clause de non-concurrence.

Lorsque, une fois le contrat de master franchise signé, le master franchiseur a eu révélation de cette manoeuvre dolosive, celui-ci est fondé à le résilier, avec effet immédiat, dès lors qu’il ne commet pas d’abus de droit (lorsque le contrat est à durée indéterminée), ou qu’il caractérise le juste motif de la résiliation (lorsque le contrat est à durée déterminée). La résiliation intervient alors aux torts exclusifs du master franchisé, qui ne peut donc prétendre à aucune indemnité.


Manquement du franchiseur à son obligation d’information pré-contractuelle
Cass. com., 20 mars 2007, pourvoi n°06-11.290

Depuis 1998, la Cour de cassation rappelle inlassablement que l’inexécution par le franchiseur de son obligation d’information pré-contractuelle ne peut être sanctionnée par la nullité du contrat de franchise que, si et seulement si, ce défaut d’information a eu pour résultat de vicier effectivement le consentement du franchisé.

C’est la solution que retient à nouveau cet arrêt du 20 mars 2007, par lequel la Haute juridiction affirme sèchement qu’«en déduisant un vice du consentement du franchisé du seul manquement du franchiseur à son obligation d'information précontractuelle, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ».


Responsabilité du franchiseur ayant approvisionné le franchisé de son concurrent
Cass. com., 3 avril 2007, pourvoi n°05-11.918

Un franchiseur engage sa responsabilité lorsqu’il se rend complice de la violation par le franchisé de son concurrent d’une obligation découlant de son contrat de franchise.
En règle générale, le manquement réside dans la violation par le franchisé de son obligation post-contractuelle de non ré-affiliation, à propos de laquelle la jurisprudence a posé un devoir pour le franchiseur concurrent de "se" renseigner (v. not., CA Chambéry, 13 décembre 2005).

Toutefois, ce devoir de "se" renseigner n’est pas systématique, en témoigne l’arrêt rendu le 3 avril 2007 par la Cour de cassation. Un franchisé avait résilié son contrat de franchise avant d’être contraint, à le reprendre compte tenu d’une ordonnance de référé entre-temps obtenue à son encontre.

Durant cette période de 4 mois, la société franchisée avait apposé l’enseigne d’un réseau concurrent auprès duquel elle s’était constamment approvisionnée.
Pour écarter la responsabilité du réseau concurrent, la Cour de cassation approuve la décision des juges du fond ayant retenu que la société concurrente avait légitimement pu croire que le contrat de franchise n'existait plus, dès lors que :
- d'une part, le franchisé n’avait souscrit aucun engagement d'approvisionnement exclusif dans son premier contrat de franchise ;
- d'autre part, les faits reprochés étaient intervenus entre le jour où le franchisé avait dénoncé son contrat de franchise, et celui où il avait été condamné à reprendre l'exécution de ce même contrat.


Pouvoirs des arbitres : du difficile maniement des demandes apparemment «incidentes »
Cass. civ. 1ère, 6 mars 2007, pourvoi n°06-16.423

Une affaire à rebondissements vient de connaître son épilogue judiciaire. Statuant après une première cassation et un arrêt rendu par une cour de renvoi, la Cour de cassation a fini par affirmer, par un attendu ayant valeur de principe, que «lorsque son investiture procède d'un compromis, l'arbitre ne peut, sans nouvel accord des parties, être saisi par une partie d'une demande incidente n'entrant pas, par son objet, dans les prévisions du compromis».

La Cour de cassation en déduit logiquement «qu'ayant souverainement constaté que la demande relative à l'éventuelle responsabilité quasi délictuelle de la société "cessionnaire" s'analysait non comme une demande incidente ayant le même objet que la demande principale mais comme une demande ayant un objet différent, la cour d'appel n'a pu qu'annuler la sentence arbitrale du fait de la méconnaissance par les arbitres de l'étendue de leur mission».

Conséquences pratiques de la jurisprudence actuelle
sur le régime de la clause de « porte-fort d’exécution »

Le contrat de franchise peut comporter une clause dite de «porte-fort d’exécution», par laquelle un dirigeant ou associé d’une société franchisée («le promettant») se fait garant, au profit du franchiseur («le bénéficiaire»), de l’exécution des obligations souscrites par la société franchisée («le tiers») en vertu de son contrat de franchise.

L'engagement de porte-fort étant une obligation de résultat, la simple constatation de sa violation engage la responsabilité du promettant. Dès lors, si le tiers est défaillant, le promettant devra indemniser le bénéficiaire. L’originalité – et l’efficacité – de cette garantie tient donc au fait que le promettant, s’oblige, non à exécuter l’obligation à la place de celui dont il se porte fort, mais à indemniser le bénéficiaire, créancier du tiers, du préjudice que lui cause l’inexécution par le tiers de ses obligations. Autrement dit, la seule inexécution par la société franchisée de l’une des obligations qui lui incombe en application du contrat de franchise fait naître au profit du franchiseur une créance de dommages et intérêts sur la personne du dirigeant, personne physique.

Or, on le sait, la jurisprudence de la Cour de cassation est venue apporter à cette question des réponses dont certaines troublent la situation du porte-fort d’exécution.

En décidant en effet que la promesse de porte-fort est constitutive d’un engagement personnel «autonome», la Cour de cassation (Cass. Civ. I°, 25 janvier 2005, n°01-15.926) en a déduit que la mise en cause de la responsabilité du promettant, en cas d’inexécution de la dette principale, ne pouvait être paralysée par l’invocation de la nullité de cette dette par le promettant.

Or, s’il est clair qu’au regard de l’objet de cet engagement du promettant, qui ne consiste pas dans la dette du débiteur garanti mais dans l’exécution de cette dette, le porte-fort d’exécution est dans une certaine position d’autonomie, celle-ci ne saurait s’entendre dans le sens qui est le sien en matière de garanties autonomes. Dans ce dernier cadre, l’autonomie exprime l’exclusion de toute connexion entre l’engagement de garantie et l’engagement garanti : une fois la garantie constituée, elle relève de son seul régime, lequel ne saurait marquer une prise en compte de la situation de l’engagement garanti. Aussi, plus récemment, la chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. Com., 13 décembre 2005, n°03-19217) semble, de l’avis de la plupart des commentateurs, avoir maladroitement distingué le «porte-fort de ratification» du «porte-fort d’exécution», en leur associant des régimes juridiques jusqu’alors inédits.

Cette décision qualifie en effet le porte-fort d’exécution d’engagement «accessoire à l’engagement principal souscrit par le tiers» et en tire pour conséquence que le promettant «s’engage à satisfaire à l’engagement principal si le tiers ne l’exécute pas». La solution est à la fois critiquable et contradictoire.

Critiquable, car une telle formule suggère très fortement qu’en cas de défaillance du tiers dans l’exécution de la dette principale, le promettant prendrait purement et simplement la place du tiers ; or, de l’avis unanime, un tel résultat est tout à fait critiquable car il revient ni plus ni moins à transformer le porte-fort d’exécution en une sorte de cautionnement.

Contradictoire aussi, car il censure la décision d’appel qui avait refusé d’appliquer l’article 1326 au porte-fort considéré, estimant donc que cet acte portait bien un engagement de payer, puisque l’exigence, ad probationem, d’une mention manuscrite ne concerne que de tels engagements… C’est dire combien, du fait de ces décisions récentes, le régime et la situation du porte-fort d’exécution restent encore incertains. C’est pourquoi, en attendant un éclaircissement jurisprudentiel, on ne peut que conseiller de recourir avec une certaine prudence au porte-fort d’exécution ; à tout le moins, de le faire en connaissance des solutions actuelles.

Tour d'horizon

Propriété intellectuelle et droit de suite
Décret n°2007-756 du 9 mai 2007

Le très attendu décret n°2007-756 du 9 mai 2007 pris pour l'application de l'article L.122-8 du Code de la propriété intellectuelle et relatif au droit de suite a été publié au Journal officiel du 10 mai. Ce texte, qui modifie substantiellement les articles R. 122-1 à R. 122-11 du code, sera applicable à toutes les ventes conclues à compter du 1er juin 2007.

Exception d'inexécution
Cass. com., 3 avril 2007, pourvoi n°06-10.834

L'exception de nullité peut seulement être invoquée pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté, peu important, précise la Cour de cassation, que celui-ci ait fait naître des obligations à exécution successive.

Délai de conservation des archives comptables
Cass. com., 24 avril 2007, pourvoi n°21-477

Par un arrêt de principe, publié au Bulletin, la Cour de cassation rappelle qu’il résulte de l'article L. 123-22 du Code de commerce que les documents comptables et pièces justificatives n'ont pas à être conservés par un commerçant au-delà d'une durée de dix ans. Selon cette décision, la règle est d’application générale et ne souffre aucune exception.

Cautionnement et inscription de privilège
Cass. civ. 1 ère, 3 avril 2007, pourvoi n°06-12.531

L’établissement de crédit, bénéficiaire du privilège institué par l'article 2103-2°du Code civil, qui se garantit par un cautionnement, s'oblige envers la caution à inscrire son privilège. A défaut, les cautions sont déchargées de leur engagement.

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