Dossiers de la franchise
La Lettre du Cabinet, Janvier 2009
ÉDITORIAL
Le droit des entreprises en difficulté marque incontestablement l’actualité juridique de ce mois. En effet, il nous est apparu inévitable de commenter l’ordonnance du 18 décembre 2008 qui, moins de 4 ans après la loi du 26 juillet 2005, réforme en profondeur les procédures de conciliation et de sauvegarde.
Plus généralement, c’est à une déferlante de textes réglementaires que l’on assiste. En droit des sociétés tout d’abord, on retiendra le très attendu décret précisant les modalités d’application de l’obligation, pour les commissaires aux comptes, de publier les informations relatives aux délais de paiement, ainsi que la non moins importante ordonnance fixant les règles de bonne conduite en matière de commercialisation des produits financiers. En droit du travail ensuite, deux décrets d’application de la Loi de financement de la sécurité sociale du 17 décembre dernier précisent les conditions de la mise à la retraite entre 65 et 70 ans et la règlementation des frais de transport des salariés. La procédure civile, enfin, vient opportunément s’enrichir d’un décret sur la procédure d’injonction de payer dans les litiges transfrontaliers.
De son côté, la Cour de cassation a rendu d’importantes décisions, notamment en droit des contrats, sur la question essentielle de l’abus dans la rupture d’une relation commerciale établie, mais aussi en droit immobilier où elle juge, de manière inédite, que la demande de paiement de l’indemnité d’éviction, formée en défense par le preneur, n’est enfermée dans aucun délai procédural.
En ce qui concerne l’actualité du cabinet, nous avons le plaisir de vous annoncer que l’ouvrage « Théorie et Pratique du droit de la Franchise » de Maître François-Luc SIMON sera publié le 10 février 2009 aux Editions JOLY, dans la Collection « Pratique des Affaires ».
Bonne lecture.
Jean-Charles Simon Avocat associé
François-Luc Simon Avocat associé
LIBRE PROPOS
Réforme du droit des entreprises en difficulté : « Sauvegarde de la sauvegarde »(Ordonnance n°2008-1345 du 18 décembre 2008, JO du 19/12/2008)
Trois ans après la loi du 26 juillet 2005, qui a réformé en profondeur le droit des entreprises en difficulté en instaurant notamment les nouvelles procédures de conciliation et de sauvegarde, le législateur a jugé nécessaire de procéder à d’importants ajustements. C’est l’objet de l’ordonnance du 18 décembre 2008, dont la plupart des dispositions entreront en vigueur le 15 février 2009.
Le texte renforce l’efficacité de la procédure de conciliation. La suspension des poursuites individuelles, dans le cadre de l’exécution du protocole, jusque là privilège des accords homologués - et dont le jugement faisait l’objet d’une publicité -, est désormais étendue aux accords constatés, qui demeurent confidentiels.
Mais le cœur de la réforme porte sur la procédure de sauvegarde, qui n’a en effet connu depuis 2006 qu’un succès relatif : l’objectif essentiel du nouveau texte, s’il touche à tous les aspects du droit de l’entreprise en difficulté, est de rendre cette procédure plus attrayante. Nous limiterons donc nos propos à cet aspect de l’ordonnance. Les rédacteurs du texte se sont évertués à trouver un nouvel équilibre entre l’aide au rétablissement de l’entreprise (1) et la nécessaire prise en compte des intérêts des créanciers (2).
1/ - Rétablissement de l’entreprise
Il était d’abord nécessaire de rendre la procédure plus attrayante pour les dirigeants (a), avant de leur donner les moyens de poursuivre l’activité, par la préservation de l’actif de l’entreprise (b).
a/ Prime à l’anticipation au bénéfice des dirigeants
On doit ici rappeler que l’ouverture d’une procédure de sauvegarde est une simple faculté laissée au dirigeant d’une entreprise en difficulté, au contraire des procédures de redressement et de liquidation judiciaires, imposées aux entreprises en état de cessation de paiement.
Les rédacteurs de l’ordonnance de 2008 ont donc eu la volonté d’améliorer le sort des dirigeants, en supprimant notamment une kyrielle de « sanctions » prévues à l’encontre de ces derniers. Ainsi, les dirigeants ont été mis à l’abri des « sanctions » initialement prévues : les éventuels éviction, incessibilité des parts sociales ou gel des droits de vote qui leur sont attachés, ont été supprimés (cf. abrogation de l’article L.626-4 du code de commerce).
Par ailleurs, les rédacteurs du texte ont tenu à rassurer les dirigeants quant à l’issue de la procédure : la menace d’une liquidation judiciaire automatique, en cas de résolution du plan de sauvegarde, est désormais écartée (art. L.626-27 du code de commerce). De même, la création de passerelle entre la sauvegarde et le redressement judiciaire, surtout utile dans l’hypothèse d’une cession totale, fera gagner un temps précieux au débiteur (art. L.622-10 du code de commerce).
La psychologie du dirigeant a également été prise en compte quant aux conditions de nomination de l’administrateur judiciaire. Afin de remédier au sentiment « d’intrusion » que peut représenter cette nomination, et pour instaurer un nécessaire climat de confiance, les dirigeants ont la possibilité de proposer au tribunal la nomination de l’administrateur judiciaire de leur choix (art. L.621-4 du code de commerce). On doit toutefois signaler une nuance : la possibilité de nommer l’administrateur judiciaire pour une mission d’assistance, plus contraignante que la mission de simple surveillance, et dont d’aucuns avaient envisagé la suppression, est finalement maintenue.
b/ Préservation de l’actif de l’entreprise
Un deuxième axe de la réforme porte sur la préservation des outils de production du débiteur, indispensables à la poursuite de son activité et à son rétablissement.
Une première manifestation de cette volonté est relative aux nouvelles facultés offertes au débiteur de passer outre l’interdiction de payer les créances antérieures.
Ainsi deux nouvelles dérogations à cette interdiction ont été introduites : le paiement correspondant à la levée d’une option d’achat dans une opération de crédit-bail et celui permettant le retour des biens transférés dans un patrimoine fiduciaire (art. L. 622-7 du code de commerce).
Ensuite, le droit de rétention récemment reconnu (cf. Loi de Modernisation de l’Economie du 04/08/2008) au gagiste sans dépossession, qui laisse le bien en gage à la disposition du débiteur, est neutralisé dans le cadre d’une procédure de sauvegarde, à moins que l’objet du gage ne soit inclus dans une éventuelle cession d’activité.
De même, la fiducie-sûreté, dont on rappellera ci-dessous la définition légale, voit également ses effets restreints. Les clauses organisant les cessions ou transferts du patrimoine fiduciaire déclenchés par l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, le non paiement d’une créance ou l’arrêté du plan seront réputées non écrites. Notons que cette « paralysie » ne s’applique qu’aux fiducies organisant la mise à disposition du débiteur du patrimoine fiduciaire (art. L.622-23-1 du code de commerce).
Pour autant, les ajustements de la procédure de sauvegarde profitent également aux créanciers qui voient leur représentativité et leurs prérogatives accrues, et leur diversité reconnue.
2/ - Prise en compte des intérêts des créanciers
Le législateur a notamment régulé l’efficacité des sûretés les plus récentes, parmi lesquelles la fiducie (a). Il a également étendu les prérogatives des créanciers (b).
a/ Cohabitation de la sauvegarde avec la fiducie
Introduite en droit français par la loi du 19 février 2007, la fiducie est « l’opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des sûretés, (…) à un ou plusieurs fiduciaires qui, les tenant séparés de leur patrimoine propre, agissent dans un but déterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires » (Art. 2011 du code civil). Utilisée comme sûreté, elle est souvent assortie d’une convention de mise à disposition, au profit du débiteur, des biens transférés dans le patrimoine fiduciaire constitué. Nous avons déjà vu comment le nouveau texte prenait en compte la préservation de l’actif du débiteur en vue de son rétablissement.
Afin de préserver un certain équilibre, l’ordonnance organise expressément la revendication par le créancier de biens meubles « transférés dans un patrimoine fiduciaire à titre de garantie [et] dont le débiteur conserve l’usage ». De même, elle interdit à l’administrateur de remettre en cause le transfert des actifs dans un patrimoine fiduciaire à titre de garantie - alors qu’il peut mettre un terme à la convention de mise à disposition au profit du débiteur (art. L.622-13 du code de commerce).
b/ Renforcement des droits des créanciers
A cette fin de renforcement des droits et prérogatives des créanciers, ces derniers ont d’abord vu leur représentation augmenter : ainsi, pour mieux prendre en compte le phénomène de la circulation des créances, la participation aux comités de créanciers a été élargie. Peuvent désormais participer aux comités des établissements de crédit, les cessionnaires des créances récupérées auprès des banques et fournisseurs (et non plus les seuls créanciers initiaux).
De même, le seuil de participation au comité des fournisseurs a été réduit de 5% à 3% du total des créances fournisseurs. Par ailleurs, la création d’une assemblée qui regroupe l’ensemble des obligataires, quel que soit le nombre de masses et d’émissions, est de nature à faciliter la prise de décision de cette catégorie de créanciers. Rappelons que l’adoption du projet de plan nécessite l’approbation, outre celles des comités des fournisseurs et des établissements de crédit, de cette assemblée (art. L.626-30 et suivants du code de commerce).
Les créanciers davantage impliqués dans l’élaboration du plan de sauvegarde : ils ont désormais la possibilité de soumettre des propositions. A ce titre, notons qu’un « traitement différencié des créanciers si les différences de situation le justifient » est expressément autorisé. De même, en modifiant les règles de majorité au sein des comités de créanciers - désormais calculée en fonction des votes émis -, le législateur a instauré une véritable prime à l’implication (art. L.626-30-2 du code de commerce). Enfin, le nouveau texte consacre légalement la pratique de conversion des créances en capital, meilleure assurance d’une convergence d’intérêts.
Stéphane CAVET
Avocat à la Cour
CORPORATE ET DROIT DES SOCIÉTÉS
La publication des délais de paiement dans le rapport de gestion des sociétés commerciales(Décret n°2008-1492, 30 décembre 2008, JO 31/12/2008)
Dans le but d’assurer l’efficacité de l’une de ses principales innovations, à savoir la fixation d’un plafond pour les délais de paiement, la loi de modernisation de l’économie (LME) prévoit que les sociétés dont les comptes sociaux sont certifiés par un commissaire aux comptes devront désormais publier des informations sur les délais de paiement de leurs fournisseurs ou de leurs clients. La LME exige en outre des commissaires aux comptes qu’ils établissent un rapport sur lesdites informations, lequel pourra, dans certaines conditions, être transmis au Ministère de l’Economie (C. com., art. L.441-6-1). Le décret qui devait préciser les modalités d’application de ce nouveau texte a été publié le 31 décembre dernier.
Il introduit un article D.441-4 dans le code de commerce qui impose aux sociétés concernées de publier, chaque année, dans leur rapport de gestion la « décomposition à la clôture des deux derniers exercices du solde des dettes à l’égard des fournisseurs par date d’échéance ». L’on notera qu’aucune référence n’y est faite aux délais qu’auront accordés les sociétés à leurs clients (C. com., art. L.441-6-1). Aux termes de ce même décret, les commissaires aux comptes, quant à eux, devront présenter dans leur rapport général annuel leurs observations sur la sincérité et la concordance avec les comptes annuels des éléments fournis dans le rapport de gestion (C.com., art. D.829-7-1). Ces nouvelles obligations s’appliquent aux exercices sociaux ouverts à partir du 1er janvier 2009 (C.com., art. L.441-6-1). Ainsi, certains dirigeants et commissaires aux comptes devront intégrer ces renseignements dans leurs rapports respectifs dès l’année prochaine.
Les EURL et les SASU dispensées d’insertion au BODACC(Décret n°2008-1488, 30 décembre 2008, JO 31/12/2008)
L’un des objectifs poursuivis par la loi de modernisation de l'économie (LME) était de simplifier le fonctionnement des PME, en soumettant notamment à des formalités allégées, les SARL et les SAS qui ne comptent qu'un seul associé, personne physique, qui assume, dans le même temps, personnellement la gérance ou la présidence. Ainsi, les articles L.223-1 et L.227-1 du code de commerce dispensent lesdites sociétés des formalités d’insertion au Bulletin Officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC).
L'article 5 du décret du 30 décembre 2008 est venu préciser les conditions de mise en œuvre effective de cette dispense. Il prévoit que l'insertion d’un avis au BODACC ne sera requise ni lors de l'immatriculation de ces sociétés, ni en cas de modification de leur situation.
Des codes de bonne conduite en matière de commercialisation des produits financiers(Ordonnance n°2008-1271, 5 décembre 2008, JO 6/12/2008)
Fortement attendue et s'inspirant largement du rapport Delmas-Marsalet rendu en 2005, l’ordonnance du 5 décembre dernier impose aux organisations professionnelles de se doter de codes de bonne conduite en matière de commercialisation de produits financiers. Ces codes devront définir les obligations des professionnels de la banque, de la finance et des assurances ainsi que les moyens dont ceux-ci doivent disposer pour s'y conformer. Lesdits codes pourront être homologués par le Ministre de l'Economie après avis du Comité consultatif de la législation et la réglementation financière (CCLRF).
L’Autorité des marchés financiers et l’Autorité de contrôle des assurances veilleront au respect, par les entreprises soumises à leur contrôle, des codes ainsi homologués (art. 1er). L'ordonnance prévoit par ailleurs certaines obligations en matière de publicité sur les produits financiers à l’égard de ceux qui proposent de tels produits, les distributeurs et ceux qui les émettent, les producteurs. Il est ainsi imposé aux distributeurs de soumettre aux producteurs les documents publicitaires qu'ils adressent à leurs clients. Producteurs et distributeurs devront fixer dans des conventions les modalités de ce contrôle (art.3).
Cette ordonnance qui vise essentiellement à protéger les investisseurs et les épargnants, entrera en vigueur le 1er janvier 2010.
DROIT FISCAL
Extension de la garantie contre les changements de doctrine de l’administration fiscale(Loi n° 2008-1443 portant Loi de Finances rectificative pour 2008, article 47)
Dans le souci de garantir la sécurité juridique des contribuables, l’article L 80 A du Livre des Procédures Fiscales interdit aux services fiscaux de procéder à des rehaussements d’impositions antérieures qui seraient en contradiction avec la doctrine administrative en vigueur au moment où il en a été fait application, soit par l’administration fiscale, soit par le contribuable.
La doctrine en cause doit concerner exclusivement la matière imposable ou l’assiette de l’impôt.
La Loi de Finances rectificative pour 2008 étend le champ d’application de ces dispositions à la doctrine relative au recouvrement de l’impôt et aux pénalités fiscales.
Les instructions et circulaires en cause doivent figurer dans la partie publique du Bulletin Officiel des Impôts.
La doctrine opposable doit – quant à son contenu – apporter des précisions sur le sens du texte fiscal et revêtir une portée générale.
Intégration fiscale : conséquences de la liquidation judiciaire de la société mère(Loi n° 2008-1443 portant Loi de Finances rectificative pour 2008, article 28)
La loi de Finances rectificative pour 2008 apporte deux innovations essentielles au régime de l’intégration fiscale, ayant pour objet de limiter les conséquences fiscales de la cessation d’un groupe suite à la liquidation judiciaire de la société mère tête de groupe. Ainsi, les filiales dont les titres sont cédés à cette occasion retrouvent la disposition de la fraction du déficit fiscal d’ensemble en instance de report qui correspond aux déficits et moins-values à long terme qu’elles ont transmis au groupe.
La perte du déficit d’ensemble peut donc être limitée à la fraction provenant de l’activité propre de la mère qui, pour un holding de reprise, correspond notamment aux charges de financement de l’opération. De plus, les anciennes filiales de la mère placée en liquidation judiciaire peuvent bénéficier d’une continuité d’application du régime d’intégration fiscale. Un nouveau périmètre d’intégration peut être immédiatement constitué sous l’égide de l’une de ces filiales ou d’une société extérieure au groupe initial.
Abus de droit : extension de la procédure(Loi n° 2008-1443 portant Loi de Finances rectificative pour 2008, article 35)
La Loi de Finances rectificative pour 2008 donne une définition générale de l’abus de droit, visant l’ensemble des impôts et des actes répondant à cette définition, ainsi que toutes les sortes de créances fiscales telles que les crédits de TVA et les crédits d’impôt.
La Loi de Finances rectificative pour 2008 légalise la définition jurisprudentielle de l’abus de droit. « Afin d’en restituer le véritable caractère, l’administration est en droit d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d’un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ».
Un acte constitutif d’abus de droit s’entend de tout document ou événement manifestant - par écrit ou non - une volonté de produire des effets de droit, que cette manifestation soit unilatérale, bilatérale ou multilatérale.
ENTREPRISES EN DIFFICULTÉS
Clôture d’un redressement judiciaire pour désintéressement des créanciers(Cass. com., 16 décembre 2008, pourvoi n°07-22033)
L’article L. 631-13 du Code de commerce dispose que « s'il apparaît, au cours de la période d'observation, que le débiteur dispose des sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers et acquitter les frais et les dettes afférents à la procédure, le tribunal peut mettre fin à celle-ci. ». Cette disposition introduite par la loi du 26 juillet 2005 assouplit le régime de clôture d’un redressement judiciaire, cette dernière ne nécessitant plus l’arrêté d’un plan par le Tribunal. Ainsi, dans l’hypothèse d’une recapitalisation du débiteur au cours de la période d’observation, les juges ont la faculté, sans passer par l’arrêté d’un plan, fut-il à échéance unique, de clôturer immédiatement la procédure.
L’arrêt du 16 décembre 2008 vient préciser le régime de cette disposition : l’article L.631-16 ne permet pas en effet au débiteur d’obtenir la clôture de la procédure dès que ses disponibilités sont redevenues suffisantes pour faire face au passif échu. Le texte n’ouvre ainsi qu’une simple faculté aux juges du fond, à qui la Cour de cassation reconnait un pouvoir souverain quant au prononcé effectif de la clôture : outre la nécessaire condition légale de désintéressement des créanciers, ils peuvent exiger du débiteur, et c’est le cas en l’espèce, des garanties supplémentaires, comme la démonstration de la pérennité de l’entreprise suite à la clôture de la procédure.
Ouverture d’une liquidation judiciaire suite à la résolution d’un plan de redressement(Cass. com., 18 décembre 2008, pourvoi n°07-17130)
L’arrêt précité rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation nous permet de revenir sur les procédures applicables en cas de résolution d’un plan de sauvegarde (dans la procédure éponyme) ou de continuation (dans un redressement judiciaire) du fait de la cessation des paiements en cours d’exécution du plan. La Cour de cassation confirme la solution existante dans le cadre d’un redressement judiciaire : constatant la cessation des paiements au cours de l’exécution du plan, le tribunal doit décider de la résolution du plan et de l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire. Cette solution illustre le principe « redressement sur redressement ne vaut » (cf. nouvelle rédaction de l’article L.631-20-1 du code de commerce).
Encore faut-il que la cessation des paiements soit bien caractérisée, ce que rappelle l’arrêt du 18 décembre 2008. Dans le cas contraire, la résolution est prononcée pour simple inexécution du plan et le régime nouvellement applicable est identique à celui de la sauvegarde. Dans le cadre d’une procédure de sauvegarde, la résolution du plan de sauvegarde du fait de la cessation de paiement n’entraîne plus – et c’est une nouveauté de l’ordonnance du 18 décembre 2008 – l’ouverture automatique d’une liquidation judiciaire. Le juge, pour décider de la procédure à appliquer, devra s’en tenir au critère économique classique : il ouvrira ainsi une liquidation judicaire si le redressement est manifestement impossible, un redressement judiciaire dans le cas contraire (cf. art. L.626-7 du code de commerce).
Vers un assouplissement des conditions de remise de dettes par les créanciers publics(Projet de loi adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale le 8 janvier 2009)
L’article 5 bis du projet de loi « pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics ou privés » modifie les conditions de remises de dettes par les créanciers publics, l’administration fiscale et les organismes de protection sociale. Ces remises de dettes, possibles depuis la loi du 26 juillet 2005 portant réforme des procédures collectives, sont strictement encadrées.
Elles doivent notamment être concomitantes à des efforts consentis par des créanciers privés. Le législateur propose de ne plus soumettre l’octroi de remises de dettes par des créanciers publics à cette concomitance – et d’abandonner les plafonnements relatifs. Ainsi, des remises de dettes par les créanciers publics, impossibles jusqu’alors, seraient désormais envisageables.
CONTRATS COMMERCIAUX
Rupture fautive des pourparlers et préjudices réparables(Cass. civ. 3ème, 7 janvier 2009, pourvoi n°07-20.783)
« La faute commise dans l’exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers précontractuels ne peut être la cause d’un préjudice consistant dans la perte de chance de réaliser les gains que permettait d’espérer la conclusion du contrat ». Tel est l’attendu de principe énoncé par la Cour de cassation dans cet arrêt au visa de l’article 1382 du code civil.
En l’espèce, le bailleur d’un bail commercial ayant interrompu les négociations qu’il avait entreprises avec son preneur et une société tierce relativement à la cession dudit bail, ces derniers l’assignèrent aux fins d’obtenir la réparation de leurs préjudices et réclamaient, à ce titre, tant le remboursement de leurs frais engagés pour la négociation, que la perte de chance d’exploiter le fonds de commerce - pour le candidat cessionnaire - et la perte d’exploitation - pour le preneur -. Les juges du fond sont sèchement censurés pour avoir fait droit à leur demande.
La solution n’est pas nouvelle. On sait que, si la rupture des pourparlers peut être fautive et donner lieu à réparation sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la faute commise à cette occasion ne permet pas la réparation de la perte de chance de conclure le contrat projeté.
La rupture des relations commerciales établies et l’article L.442-6-1, 5° du code de commerce(3 arrêts, Cass. com., 16 décembre 2008, pourvois n°07-18.050 et n°07-15.589 ; Cass. com., 13 janvier 2009, pourvoi n°08-13.971)
L’article L.442-6-I, 5° du code de commerce sanctionne le fait de « rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale établie et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ». Par trois arrêts rendus à quelques jours d’intervalle, la chambre commerciale de la Cour de cassation apporte des précisions sur le domaine et les conditions d’application dudit article.
En premier lieu, elle affirme que l’action en responsabilité recherchée sur le fondement de cet article est de nature délictuelle. Telle est, en tout cas, la position de la chambre commerciale de la Haute juridiction qui, dans son arrêt du 13 janvier dernier, écarte l’application de la clause attributive de juridiction figurant dans le contrat de concession, après avoir constaté que le concessionnaire avait assigné son cocontractant exclusivement sur le fondement de l’article précité. Si cette solution a le mérite d’être plus favorable au demandeur, réputé plus faible économiquement, elle prend le contre-pied de celle vers laquelle semble s’orienter la première chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 1ère, 6 mars 2007, pourvoi n°06-10.946 ; 22 octobre 2008, pourvoi n°07.15-823).
Cette divergence de jurisprudence devrait trouver une issue avec le décret qui sera pris en application du nouvel article L. 442-6-III, 5° issu de la LME du 4 août 2008.
Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 16 décembre 2008, la Haute juridiction réaffirme la solution selon laquelle « toute relation commerciale établie, qu’elle porte sur la fourniture d’un produit ou d’une prestation de service, entre dans le champ d’application de l’article L.442-6-I, 5° ». Ce faisant, elle censure une cour d’appel l’ayant exclu au motif que les prestations réalisées par un architecte, issues d’une création purement intellectuelle et exclusive de toute acquisition antérieure en vue de la revente constituaient une activité par essence civile.
Dans la dernière espèce, la Cour de cassation se prononce sur la condition de l’existence d’une « relation établie » entre les protagonistes et durcit sa jurisprudence en approuvant une cour d’appel d’avoir considéré qu’une telle relation n’était pas établie dès lors que les relations contractuelles constituaient une juxtaposition de relations de sous-traitance indépendantes, que les parties n’avaient pas passé d’accord-cadre et qu’aucun chiffre d’affaires ou exclusivité n’avait été garantie.
FRANCHISE
Liquidation judiciaire du franchisé et requalification du contrat de franchise(Cass. soc., 16 décembre 2008, pourvoi n°06-46.105)
Les demandes de requalification du contrat de franchise en contrat de travail alimentent régulièrement la jurisprudence. Dans l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt commenté, la demande de requalification n’émanait pas du franchisé lui-même, mais du liquidateur judiciaire. Se présente alors une difficulté : un mandataire judiciaire est-il recevable à formuler une telle demande ?
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence avait répondu par la négative, au motif que la demande en requalification du contrat de franchise en contrat de travail est une action strictement personnelle et exclusivement attachée à la personne qui se prétend salariée.
Le liquidateur faisait valoir devant la Cour de cassation, entre autres moyens, que l’action en requalification du contrat de franchise en contrat de travail concernait le patrimoine du débiteur et, comme telle, appartenait au liquidateur.
La chambre sociale de la Cour de cassation rejette cette argumentation : reprenant le motif de la Cour d’appel, elle confirme que la demande de requalification ne peut être exercée par les organes de la procédure collective. La Haute juridiction précise en outre que cette fin de non recevoir, d’ordre public, doit être soulevée d’office par les juridictions du fond.
PERSONNES ET PATRIMOINE
Présentation du projet de loi en droit de la filiation(Projet de loi AN, 6 janvier 2009)
Signalons l’adoption définitive par l’Assemblée Nationale du projet de loi ratifiant l’ordonnance du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation. Ce texte entend tirer les conséquences de l’égalité de statut entre les enfants quelles que soient les conditions de leur naissance. Il couronne ainsi une évolution en faveur de l’égalité.
Il comporte en outre des modifications techniques qui achèvent cette évolution en faveur de l’égalité. Les règles tant au regard de l’établissement du lien de filiation que de l’anéantissement de ce lien sont unifiées et simplifiées. Ainsi, la distinction entre la filiation légitime et la filiation naturelle est définitivement abolie.
Action en rescision et protocole d’accord opérant partage(Cass. civ. 1ère, 17 décembre 2008, pourvoi n°07-15.459)
Par le présent arrêt, la Cour de cassation affirme, dans un attendu de principe dépourvu d’équivoque, que « l’action en rescision pour lésion est recevable non seulement contre les partages proprement dits, mais également contre les actes qui, en vue de la réalisation du partage et concourant à sa réalisation, attribuent des biens indivis à certains copartageants, dès lors que, par cette opération, assimilable à un partage, les biens sont définitivement sortis de l’indivision entre les parties qui y ont figuré ».
En l’espèce, un protocole d’accord conclu entre deux ex-époux, avait pour effet de conférer à la femme la propriété des valeurs mobilières qu’elle détenait. Les juges du fond sont censurés au visa de l’article 888, alinéa 1er, du code civil (dans sa rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006), pour avoir déclarée irrecevable l’action en rescision de l’ex-époux aux motifs que ce dernier ne pouvait se prévaloir d’une erreur sur l’objet de la transaction qui a entre les parties autorité de la chose jugée en dernier ressort.
SOCIAL ET RESSOURCES HUMAINES
Ouverture de « Pôle emploi » le 5 janvier 2009(www.pole-emploi.fr)
Le nouvel opérateur chargé du service public de l’emploi « Pôle emploi » a officiellement été lancé le 5 janvier 2009. Il est issu de la fusion de l’Assédic et de l’ANPE prévue par la loi du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi (Loi n° 2008-126 du 13 février 2008, J.O. n°38 du 14 février 2008).
Sa mission est d’accueillir, indemniser, orienter et accompagner les demandeurs d’emploi et les personnes en activité souhaitant évoluer. Cette entité propose également un large service aux entreprises dans le cadre de leur recrutement. Depuis janvier 2009, les entretiens réalisés par l’ANPE et l’Assédic ont lieu le même jour et au même endroit ; en outre, un numéro de téléphone unique est mis en place concernant la recherche d’emploi et l’indemnisation (39-49) ainsi qu’un site internet unique (www.pole-emploi.fr).
Dès le second semestre 2009, sera mis en place un entretien unique pour l’inscription, l’indemnisation et l’accompagnement vers l’emploi, et chaque demandeur d’emploi sera suivi par un conseiller personnel.
Précisions sur la mise à la retraite entre 65 et 70 ans(Décret n°2008-1515, 30 décembre 2008, JO 31/12/2008)
Un décret du 30 décembre 2008 pris en application de la Loi de financement de la sécurité sociale (Loi 2008-1330 du 17 décembre 2008, JO du 18) vient préciser les conditions de mise en œuvre de la mise à la retraite d’un salarié de 65 à 70 ans.
L’employeur doit interroger le salarié, 3 mois avant son 65ème anniversaire, sur son intention de quitter volontairement l’entreprise pour bénéficier d’une pension de vieillesse pour l’année à venir.
En cas de refus du salarié dans un délai d’un mois qui lui est imparti ou en cas d’absence de consultation du salarié par l’employeur, ce dernier ne pourra mettre le salarié d’office à la retraite durant les 12 mois suivants.
Cette procédure devra être réitérée chaque année jusqu’au 69ème anniversaire du salarié, l’employeur reprenant sa liberté lorsque le salarié atteint l’âge de 70 ans.
Pour l’année 2009, les mises à la retraite devront être notifiées avant le 1er janvier ou faire l’objet d’une consultation du salarié, 3 mois avant la mise effective en retraite, et non avant sa date d’anniversaire.
Nouvelle réglementation de remboursement des frais de transport des salariés(Décret n°2008-1501, 30 décembre 2008, JO 31/12/2008)
Un décret du 30 décembre 2008 précise les modalités de prise en charge par l’employeur, des frais de transport des salariés, en application de la Loi de financement de la sécurité sociale.
Sont insérées deux nouvelles sections au code du travail : l’article R.3261-1 prévoit la prise en charge obligatoire, à raison de 50%, des frais de transports publics ou de services publics de location de vélos ; l’article R.3261-11 prévoit la prise en charge de tout ou partie des frais de carburant ou d’alimentation des véhicules électriques contraints d’utiliser leur véhicule personnel pour se rendre à leur travail en raison de leur lieu de résidence ou de leurs horaires.
Le bulletin de paye devra faire apparaitre cette prise en charge, à défaut pour l’employeur d’être pénalement sanctionné à compter du 1er avril 2009, les autres dispositions étant applicables dès le 1er janvier 2009.
IMMOBILIER
Recevabilité d’une contestation formée en défense(Cass. civ, 3ème, 10 décembre 2008, pourvoi n°07-15.241)
La règle « l’action est temporaire et l’exception perpétuelle » ne se limite pas aux seules exceptions de nullité. C’est ce que vient de juger la Cour de cassation dans une affaire où un preneur réclamait le paiement d’une indemnité d’éviction plus de 3 ans après la date d’effet du congé. En l’espèce, le bailleur avait fait délivrer un congé au preneur avec dénégation du droit au statut des baux commerciaux, pour le 31 août 2003, puis l’avait assigné en validation du congé. En défense, le preneur a d’abord contesté la validité du congé puis a sollicité le paiement d’une indemnité d’éviction, par voie de conclusions en date du 9 octobre 2006. Le bailleur a soulevé l’irrecevabilité de la demande au motif qu’elle était prescrite.
La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir fait droit aux demandes du preneur dès lors que « par sa contestation du congé formée en défense à l’action principale engagée par la société bailleresse devant le tribunal, le preneur avait conservé la possibilité de former à toute hauteur de la procédure une demande en paiement de l’indemnité d’éviction, et que cette demande bien que formée plus de 3 ans après la date d’effet du congé, ne se heurtait pas à la forclusion prévue à l’article L.145-9 du code de commerce ».
La Cour de cassation a donc estimé qu’en tant qu’exception, la demande de paiement d’une indemnité d’éviction pouvait être valablement invoquée à tout moment de la procédure.
Droit de préemption et liquidation judiciaire(CE, 17 décembre 2008, n°316411)
Le Conseil d’Etat vient de juger qu’une commune était recevable à exercer son droit de préemption sur un immeuble dépendant d’un plan de cession. En l’espèce, le juge commissaire d’une SCI en liquidation judiciaire avait autorisé la vente d’un immeuble appartenant à ladite SCI. Le maire de la commune ayant exercé son droit de préemption, l’acquéreur évincé a saisi le tribunal administratif aux fins de voir la décision de préemption annulée. Débouté, l’acquéreur a formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat qui a également rejeté sa demande.
Le Conseil d’Etat a en effet estimé que bien que s’agissant de la vente d’un immeuble appartenant à une société en liquidation judiciaire, la vente n’avait pas été mise en œuvre dans le cadre d’un plan de cession mais avait été conclue de gré à gré, de sorte que la commune pouvait exercer son droit de préemption sur cet immeuble. Or, c’est sans compter sur l’ordonnance du 18 décembre 2008 sur la réforme du droit des entreprises en difficulté qui pose un principe général d’exclusion du droit de préemption à l’encontre de biens compris dans un plan de cession.
Promesse synallagmatique de vente et renonciation à une condition suspensive défaillie(Cass. civ. 3ème, 17 décembre 2008, pourvoi n°07-18.062)
Une promesse de vente prévoyait que la cession devait intervenir sous condition suspensive d’obtention du permis de construire avant le 31 juillet 2004, sauf renonciation de l’acquéreur à se prévaloir de la non-réalisation de la condition, et que la vente devait être réitérée devant notaire avant fin 2004. La condition ne s’étant pas réalisée, le vendeur a assigné, en 2005, l’acquéreur aux fins de voir la promesse déclarée nulle. Le bénéficiaire demandait, à titre reconventionnel, à ce que la vente soit déclarée parfaite, indiquant qu’il avait renoncé à se prévaloir de la condition.
La Cour de cassation censure les juges du fond d’avoir considéré la vente parfaite, aux motifs que « la date du 31 décembre 2004 constituant le point de départ de l’exécution forcée du contrat, la renonciation de l’acquéreur au bénéfice des conditions suspensives devait intervenir avant cette date ». La Haute juridiction considère donc que la renonciation intervenue en 2005, soit après la date fixée pour la réitération de la vente par acte authentique, était tardive. Ce faisant, elle estime qu’il est possible de renoncer à une condition défaillie.
PROCÉDURE CIVILE ET VOIES D’EXÉCUTION
La notion de demande reconventionnelle(Cass. civ. 3ème, 3 décembre 2008, pourvoi n°07-16.748)
Comme le précise l’article 564 du code de procédure civile : « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
C’est à l’appui de ces dispositions que la Cour de cassation a précisé qu’une demande d’expertise sollicitée pour la première fois en appel sur le fondement de l’article 145 du code précité ne tend pas aux mêmes fins qu’une demande de communication de pièces et qu’ainsi la cour d’appel a justement déduit que cette demande était nouvelle et donc irrecevable (Civ. 2ème, 16 oct. 2008, pourvoi n°07-19.292).
C’est à l’appui de ce même article qu’a été déclarée irrecevable une demande de dommages et intérêts formulée pour la première fois en appel.
Le justiciable prétendant toutefois que sa demande n’était qu’une demande reconventionnelle au sens de l’article 64 du code de procédure civile et qu’elle se rattachait aux prétentions originaires par un lien suffisant, a décidé de se pourvoir en cassation. Or, la Cour de cassation, après avoir relevé que les codéfendeurs n’élevaient aucune prétention à son encontre et rappelé que la Cour d’appel n’était pas tenue de rechercher si la demande se rattachait aux prétentions originaires par un lien suffisant, a rejeté le pourvoi.
Les procédures européennes d’injonction de payer et de règlement des petits litiges dans le CPC(Décret n°2008-1346 du 17 décembre 2008)
Le décret n°2008-1346 du 17 décembre 2008 vient de transposer en droit interne les dispositions prises par le règlement CE n°861/2007 du 11 juillet 2007 relatif au règlement des petits litiges et le règlement CE n°1896/2006 du 12 décembre 2006 relatif à la procédure européenne d’injonction de payer.
Ainsi, les nouveaux articles 1382 à 1390 du code de procédure civile organisent la procédure européenne de règlement des petits litiges. Cette procédure s’applique aux litiges transfrontaliers en matière civile et commerciale dont le montant est inférieur à 2.000 €.
Concernant la procédure européenne d’injonction de payer, elle est désormais consacrée par les articles 1424-1 à 1424-15 du code de procédure civile. Cette procédure simplifiée vise à accélérer et réduire les coûts des litiges transfrontaliers sur les créances pécuniaires incontestées en matière civile et commerciale.
Ces procédures sont à la disposition des citoyens européens parallèlement aux procédures prévues par les législations nationales des États membres. Elles sont reconnues et exécutées dans tous les Etats membres à l’exception du Danemark.
Les pouvoirs du juge des référés(Cass. civ. 2ème, 11 décembre 2009, pourvoi n°07-20.255)
Par arrêt en date du 11 décembre 2008, la Cour de cassation a rappelé que le juge des référés ne peut allouer des dommages et intérêts, mais seulement des provisions. Dans cette affaire, les adjudicataires d’un bien immobilier ont assigné en référé les occupants aux fins d’obtenir leur expulsion ainsi que leur condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation.
La Cour d’appel, après avoir relevé que leur maintien abusif a occasionné un préjudice moral et matériel, les a condamnés à des dommages et intérêts. Or, en statuant sur une demande de dommages-intérêts et non de provision, la cour d'appel a violé l’article 809 du code de procédure civile et excédé ses pouvoirs.
PROPRIETE ARTISTIQUE ET INDUSTRIELLE
La condition de distinctivité de la marque(Cass.com., 16 décembre 2008, pourvoi n°08-11.816)
Pour être valable la marque doit présenter un caractère distinctif dont sont dépourvus, aux termes de l’article L. 711-2 du code de la propriété intellectuelle, les signes qui sont exclusivement composés de la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service, et ceux pouvant servir à en désigner une caractéristique.
En l’espèce, le titulaire de la marque Femme pour désigner des journaux et périodiques, magazines, revues, livres, publications, engagea une action en contrefaçon pour s’opposer à l’usage des marques Bordeaux Femmes, Nantes Femmes, Angers Femmes et Rennes Femmes, pour désigner des magazines. Reconventionnellement, le défendeur remettait en cause la validité de la marque et soulevait sa nullité.
Le pourvoi reprochait à l’arrêt de ne pas avoir retenu la nullité de la marque alors que, selon la thèse soutenue, le signe litigieux était essentiellement constitué du nom du public auquel elle est destinée.
La Cour de cassation rejette le pourvoi et approuve la cour d’appel qui a retenu que le terme Femme utilisé pour désigner des journaux et périodiques, magazines, revues, livres et publications, ne constitue pas la désignation générique de tels produits, qu’il est tout au plus évocateur du public visé par la publication ; qu’en outre, la marque dont la validité est remise en cause ne décrit pas les caractéristiques des produits visés dans l’enregistrement.
Cet arrêt, qui se prononce sur des causes de nullité pour absence de caractère distinctif à savoir le caractère descriptif et générique du signe, illustre dans le même temps la difficulté, dans certaines circonstances, à distinguer la marque simplement évocatrice, valable, de la marque descriptive ou générique qui encourt la nullité et ne peut, par conséquent, fonder une action en contrefaçon.
Tout est question d’espèce, l’appréciation de l’arbitraire du signe étant effectuée en contemplation des produits et services concernés.
Action en déchéance de la marque et intérêt à agir(Cass.com., 13 janvier 2009, pourvoi n°07-19.571)
Le plus souvent sollicitée reconventionnellement à l’occasion d’une action en contrefaçon par le défendeur soucieux d’échapper aux poursuites, la déchéance de la marque sanctionne le titulaire qui n’en fait pas un usage sérieux pendant une durée ininterrompue de cinq ans.
L’article L.714-5 alinéa 3 du code de la propriété intellectuelle ouvre « à toute personne intéressée » la possibilité de demander la déchéance de la marque, soit totalement, soit partiellement seulement pour les produits ou services qui ne seraient pas concernés par l’exploitation de la marque ; toutefois, la jurisprudence enserre cette faculté dans certaines limites comme l’illustre l’arrêt commenté.
La Cour de cassation approuve l’arrêt d’avoir déclaré la demande en déchéance de la marque irrecevable faute d’intérêt.
La Haute Cour approuve la cour d’appel d’avoir considéré que le demandeur n’établissait pas que les produits pour lesquels il sollicitait la déchéance de la marque faisaient partie du même secteur d’activité professionnelle que le sien et, qu’en conséquence, il était empêché de commercialiser cette catégorie de produits.
La solution est classique et s’inscrit dans le courant de jurisprudence qui, prenant appui sur le principe de spécialité et l’article 31 du code de procédure civile, exige du demandeur qu’il établisse un intérêt à agir résidant, notamment, dans l’exercice d’activités similaires ou la commercialisation de produits similaires ou, plus largement, le besoin d’avoir accès au signe concerné pour l’exercice de ses activités.
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