Dossiers de la franchise
La Lettre du Cabinet, Juillet/Août 2009
Editorial
La trêve estivale ne nous a pas laissés en reste !
C’est tout d’abord la célèbre affaire Eurotunnel qui revient sur le devant de la scène. Par une kyrielle d’arrêts rendus le 30 juin dernier, la Cour de cassation s’est enfin prononcée sur la question controversée de la recevabilité des tierces oppositions émanant de créanciers étrangers.
Le droit des affaires est le siège de décisions essentielles pour les dirigeants et praticiens. Elles concernent la sanction de la violation de la clause d’information sur la mise en œuvre de la garantie d’actif et de passif et l’étendue des pouvoirs de l’actionnaire exerçant l’action sociale ut singuli. Pour ce qui concerne les entrepreneurs en nom propre, on retiendra le projet loi de création de l’entreprise à « patrimoine affecté », dispositif qui devrait relancer l’attractivité de l’entrepreneuriat individuel en assurant une protection du patrimoine personnel des artisans.
En droit immobilier, plusieurs décisions clarifient certaines solutions importantes en la matière : en l’absence de clause contractuelle imposant l’obligation d’exploiter les lieux loués, le défaut d’exploitation effective par le preneur ne saurait constituer un manquement contractuel ; commet une faute délictuelle le bailleur qui s’abstient, au moment du renouvellement du bail, d’informer le cessionnaire du fonds de commerce de la non-conformité des locaux loués ; enfin, il est rappelé que l’action en fixation du montant de l’indemnité d’éviction est enfermée dans un délai de deux ans à compter de l’ordonnance ayant désigné l’expert.
A ces deux « volets », s’ajoutent, dans tous les autres domaines du droit propres à notre activité, de nombreuses innovations législatives et jurisprudentielles.
En ce qui concerne notre actualité, on signalera enfin que le Département de droit social est classé en « forte notoriété » par le magazine Décideurs.
LIBRE PROPOS
Sauvegarde : la recevabilité de la tierce opposition des créanciers étrangers
(Cass. com., 30 juin 2009, 5 arrêts, pourvois n°08-11.902 à 08-11.906)
Comme en témoignent ces cinq arrêts de principe promis au rapport annuel de la Cour de cassation, l’affaire Eurotunnel n’en finit pas d’alimenter les chroniques. Le groupe Eurotunnel fut le premier grand groupe à bénéficier d’une procédure de sauvegarde instituée par la loi du 26 juillet 2005. Par 17 jugements du 2 août 2006, le Tribunal de commerce de Paris avait ouvert 17 procédures de sauvegarde au bénéfice des 17 sociétés françaises, anglaises, espagnoles, néerlandaises, belges et allemandes du groupe.
Le Tribunal de commerce de Paris, se fondant sur l’article 3 du règlement CE du 29 mai 2000 (règlement CE n° 1346 -2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité), avait considéré que le « centre des intérêts principaux » des sociétés du groupe se situait sur le territoire français. Les créanciers (anglais…) des sociétés anglaises ont formé tierce opposition à l’encontre des jugements d’ouverture rendus au bénéfice de ces sociétés.
Les créanciers contestaient principalement la compétence du Tribunal de commerce de Paris. Aux termes de plusieurs arrêts rendus le 29 novembre 2007, la Cour d’appel de Paris avait déclaré la tierce opposition irrecevable. La Cour s’était fondée sur les dispositions de l’article 583 alinéa 2ème du code de procédure civile selon lesquelles : « Les créanciers et autres ayants cause d’une partie peuvent toutefois former tierce opposition au jugement rendu en fraude de leurs droits ou s’ils évoquent des moyens qui leur sont propres ». La Cour avait considéré que la question de la compétence du Tribunal ne constituait pas pour les créanciers étrangers un « moyen propre ».
Sur le fondement du règlement du 29 mai 2000 et de l’article 6 § 1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), la Cour de cassation a, le 30 juin 2009, censuré cette position et a affirmé que « les créanciers domiciliés dans un Etat membre autre que celui de la juridiction qui a ouvert une procédure principale d’insolvabilité ne peuvent être privés de la possibilité effective de contester la compétence assumée par cette juridiction ».
Dépassant le cadre des règles internes de procédure civile, la Cour suprême a inscrit sa décision dans la sphère du droit communautaire.
Si la décision de la Cour de cassation est conforme au droit communautaire (1), son incidence dans un contexte de droit interne reste incertaine (2).
1/Une décision conforme aux règles de droit communautaire
La décision de la Cour de cassation se justifie pleinement au regard des deux principes issus du droit communautaire : la reconnaissance de plein droit des jugements ouvrant une procédure d’insolvabilité (a) et le droit pour le créancier d’être entendu par la juridiction ayant ouvert la procédure (b).
a/ La reconnaissance de plein droit des jugements ouvrant une procédure d’insolvabilité
L’article 16 du règlement du 29 mai 2000 dispose : « Toute décision ouvrant une procédure d’insolvabilité prise par une juridiction d’un Etat membre compétente en vertu de l’article 3 est reconnue dans tous les autres Etats membres ». Selon la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE), cette reconnaissance de plein droit implique, au regard du principe de confiance mutuelle, que les juridictions des autres Etats membres ne puissent pas contrôler la compétence de la juridiction ayant ouvert la procédure (CJCE, 2 mai 2006, Eurofood, affaire n°C-341/04).
La portée de cette absence de contrôle doit néanmoins s’appréhender à l’aune de la possibilité pour une juridiction d’un Etat membre d’ouvrir, en application du critère du «centre des intérêts principaux du débiteur» (art. 3 du règlement du 29 mai 2000), une procédure d’insolvabilité au bénéfice d’une société dont le siège social serait situé sur le territoire d’un autre Etat membre.
b/ Le droit des créanciers d’être entendus par la juridiction ayant ouvert la procédure
La CJCE a institué un régime protecteur des droits des créanciers du débiteur ; confrontés à l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité par une juridiction située sur un autre territoire que celui sur lequel est localisé ce dernier.
Le droit pour le créancier d’être entendu par la juridiction ayant ouvert la procédure d’insolvabilité, et tout particulièrement le droit de contester la compétence de cette dernière, sont le corollaire à la reconnaissance de plein droit des procédures d’insolvabilité.
La CJCE fonde ce droit sur les principes découlant de l’article 6 § 1 de la CEDH : procès équitable, accès au juge et égalité des armes. Le droit pour « toute personne concernée», et donc le créancier, d’être entendu par la juridiction ayant ouvert la procédure est un droit fondamental. Aussi, selon la CJCE, « la restriction à l’exercice de ce droit doit être dûment justifiée et entourée de garanties procédurales assurant aux personnes concernées par une telle procédure une possibilité de contester les mesures adoptées ».
Dans cette situation, il appartient alors au créancier qui entend contester la décision ouvrant la procédure «d’utiliser devant les juridictions de l’Etat membre où celle-ci a été ouverte les recours prévus par le droit national de cet Etat membre à l’encontre de la décision d’ouverture ».
L’exercice de ce droit d’être entendu est protégé. Faute pour la juridiction ayant ouvert la procédure de respecter ce droit, un Etat membre pourrait refuser de reconnaître la procédure d’insolvabilité qui a été ouverte (art. 26 du règlement du 29 mai 2000).
La Cour de cassation avait, dans un arrêt antérieur, fait sienne la position de la CJCE (Cass. com., 27 juin 2006, n°03-19.863).
Dans la continuité de sa précédente décision, la Cour de cassation a considéré, aux termes des arrêts du 30 juin 2009, que les créanciers étrangers étaient recevables à former tierce opposition à l’encontre des décisions du Tribunal de commerce de Paris ayant ouvert une procédure de sauvegarde au bénéfice des sociétés anglaises du groupe Eurotunnel.
2/ L’incidence incertaine de la décision dans un contexte de droit interne
L’apport de cette décision dans un contexte de droit interne est incertain. Les arrêts rendus par la Cour de cassation se situent clairement dans le cadre de l’application du droit communautaire (a) et l’article 583 alinéa 2ème du code de procédure civile ne doit pas être occulté (b).
a/ Le cadre communautaire de la décision
Le choix des textes constituant le visa n’est pas anodin. La reprise des termes de la jurisprudence européenne («compétence assumée») ne l’est pas non plus. En tout état de cause, et même si cela semble relever de la théorie, compte tenu de l’adoption du plan de sauvegarde des sociétés du groupe Eurotunnel, déclarer irrecevable la tierce opposition des créanciers étrangers aurait pu conduire à justifier la non-reconnaissance par un autre Etat membre de la procédure de sauvegarde ouverte en France.
b/ Les dispositions de l’article 583 alinéa 2ème du code de procédure civile
Un créancier français pourrait-il éventuellement se prévaloir de cette jurisprudence, et donc se fonder sur l’article 6 § 1 de la CEDH, pour contester un jugement ouvrant une procédure de sauvegarde au bénéfice d’une société de droit français ? Une réponse affirmative ne s’impose pas. Une telle solution reviendrait à rendre inopérant l’alinéa 2ème de l’article 583 du code de procédure civile selon lequel le créancier doit, pour être recevable en sa tierce opposition, démontrer un moyen propre ou une fraude à ses droits. La tierce opposition ne serait alors plus une voie extraordinaire de recours (Art. 580 du code de procédure civile) mais une voie ordinaire de recours.
Le droit à un tribunal n’est pas absolu (CEDH, 28 mai 1985, Ashingdane c/ Royaume-Uni). Le recours à l’article 6 § 1 de la CEDH par le juge français doit se faire en harmonie avec les règles de droit interne. Dans un arrêt rendu en 2006, en se fondant cumulativement sur l’article 6 § 1 de la CEDH et l’article 583 du code de procédure civile, la Cour de cassation avait déclaré l’associé d’une SCI, celui-ci étant indéfiniment responsable du passif, recevable en sa tierce opposition à l’encontre d’un jugement ouvrant la liquidation judiciaire de la SCI (Cass. com., 19 décembre 2006, n°05-14.816).
La présente décision ne doit pas tendre à remettre en cause cette harmonie. En tout état de cause, les créanciers étrangers privés de l’application des règles de droit à laquelle la localisation du débiteur devait conduire ne disposent-ils pas de ce seul fait d’un « moyen propre », au sens de l’alinéa 2ème de l’article 583 du code de procédure civile ?
CORPORATE
Déchéance automatique de la garantie de passif pour défaut d’information de l’acquéreur
(Cass. com., 9 juin 2009, pourvoi n°08-17.843)
Dans les conventions de garantie d’actif et de passif (GAP), il est habituellement stipulé une clause aux termes de laquelle l’acquéreur est tenu, avant de mettre en œuvre la GAP, d’informer le vendeur de l’événement générateur de la garantie. Depuis plusieurs années, les juridictions sont divisées sur la sanction à prononcer en cas de non-respect de ces clauses d’information. Un premier courant jurisprudentiel se montre assez sévère et prononce la déchéance automatique de la GAP alors que le second conditionne cette déchéance à l’existence d’un préjudice subi par le vendeur. Par son arrêt du 9 juin 2009, la chambre commerciale de la Cour de cassation vient conforter le premier courant.
En l’espèce, aux termes d’une GAP, le gérant de la société devait informer le cédant de tout événement susceptible de mettre en œuvre la GAP dans un délai de dix jours à compter de la date à laquelle les acquéreurs en auraient eu connaissance. Constatant des désordres de nature à faire jouer la GAP, les cessionnaires et la société ont appelé le cédant en garantie, mais ont omis de respecter l’obligation d’information prévue dans la GAP. Les juges du fond ont considéré qu’en ne respectant pas cette obligation, les cessionnaires ont perdu le bénéfice de la garantie. Devant la Cour de cassation, les cessionnaires ont soutenu qu’aucune clause de la convention ne sanctionnait le non-respect de l’obligation d’information et, qu’en conséquence, les juges du fond avaient dénaturé la volonté des parties. La Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel en affirmant que c’est par leur pouvoir souverain d’appréciation, leur permettant d’interpréter, en cas d’imprécision, la volonté des parties, que les juges ont pu décider que la violation de la clause d’information faisait obstacle à la mise en œuvre de la GAP.
Ce faisant, la chambre commerciale n’affirme pas de solution de principe permettant de trancher définitivement les divergences jurisprudentielles existantes. Cette décision invite toutefois les rédacteurs des GAP à faire preuve de vigilance en prenant soin de préciser les sanctions que les parties souhaitent attacher au non-respect de la clause d’information et d’écarter la déchéance automatique de la GAP, si telle est la volonté des parties.
Action sociale ut singuli : étendue des pouvoirs de l’actionnaire
(Cass. com., 7 juillet 2009, pourvoi n°08-15.835)
L’action sociale ut singuli s’entend de l’action intentée par un associé, au nom et pour le compte de la société. Cette action a pour but de préserver les intérêts de la société en cas d’inertie ou de défaillance des représentants légaux. Elle se justifie tout particulièrement lorsqu’il s’agit d’engager la responsabilité des dirigeants à l’égard de la société.
Si les textes précisent que le demandeur à l’action ut singuli est habilité à poursuivre la réparation de l’entier préjudice subi par la société (C. com, art. L.225-252), ils demeurent silencieux sur l’étendue des pouvoirs de ce dernier. A ce titre, l’arrêt de la chambre commerciale, rendu le 7 juillet 2009, apporte certaines précisions.
En l’espèce, en exerçant l’action sociale ut singuli à l’encontre du Président du Conseil d’administration, un actionnaire obtient, devant les juges, la condamnation de ce dernier à payer des dommages-intérêts à la société.
Afin d’assurer l’exécution de cette décision, l’actionnaire a ensuite demandé au juge de l’exécution d’assortir cette condamnation d’une astreinte. Cette demande a été jugée irrecevable par les juges du fond au motif que l’actionnaire n’étant pas le bénéficiaire direct de la condamnation principale, il ne pouvait demander la fixation d’une astreinte.
La Cour de cassation censure les juges du fond au visa de l’article L.225-252 du code de commerce. La Haute Cour affirme que ce texte confère au demandeur à l’action ut singuli tous les pouvoirs pour obtenir la réparation de l’entier préjudice et qu’en conséquence, il a qualité à agir pour demander au juge de l’exécution d’assortir d’une astreinte la condamnation dont il a obtenu le prononcé.
En se prononçant ainsi, la Cour de cassation permet d’assurer une réelle efficacité à l’action ut singuli.
DROIT FISCAL
Garantie contre les changements de doctrine
(Instruction du 29 juin 2009/ BOI 13 A-4-09 du 3 juillet 2009)
Depuis le 1er mai 2009, les instructions administratives doivent être publiées sur un site internet relevant du Premier ministre. A défaut, l’administration ne pourra revendiquer leur application et elles sont inopposables aux contribuables (Décret 2008-1281 du 8 décembre 2008, Instruction du 29 juin 2009). Les instructions antérieures au 1er mai 2009 non reprises sur le site internet sont réputées abrogées, à l’exception de celles dont la loi permet à un contribuable de s’en prévaloir.
Ainsi, le contribuable conserve le droit d’opposer à l’administration les instructions publiées (art. L.80 A du LPF), alors même que l’instruction en cause ne serait pas reprise sur le site internet du Premier ministre. Quant aux instructions postérieures au 1er mai 2009, la double publication au Bulletin Officiel des Impôts et sur le site internet est nécessaire à leur application par l’administration, elle n’est toutefois pas requise pour qu’elles puissent être invoquées par les usagers.
Location meublée
(Instruction du 28 juillet 2009 / BOI 4 F-3-09 du 30 juillet 2009)
L’instruction du 28 juillet 2009 commente les dispositions des deux lois de finances pour 2009 qui ont aménagé le régime fiscal des loueurs en meublé. Ces dispositions sont applicables à compter de l’IR 2009 et sont les suivantes :
1/ Renforcement des conditions d’accès au statut de loueur professionnel, de façon à exclure de cette qualification les contribuables pour qui cette activité relève en réalité de la gestion de leur patrimoine. Ce statut est désormais réservé aux contribuables qui, inscrits au registre du commerce en cette qualité, réalisent un montant de recettes annuelles excédant à la fois 23.000 € et les autres revenus professionnels du foyer fiscal ; 2/ Imputation des déficits des loueurs non professionnels. Les déficits provenant de l’activité de location meublée exercée à titre non professionnel ne peuvent s’imputer que sur les revenus provenant d’une telle activité au cours des dix années suivantes. Autrement dit, un tel déficit est uniquement imputable sur des bénéfices générés par une activité de location meublée exercée à titre non professionnel ; 3/ Une réduction d’impôt en faveur des loueurs non professionnels personnes physiques est accordée, sous certaines conditions. Le contribuable doit notamment s’engager à louer au moins pendant 9 ans à l’exploitant de la résidence dans lequel le logement qui ouvre droit à la réduction d’impôt est situé ; 4/ Régime des loueurs professionnels. Les déficits sont imputables sur le revenu global sans limitation de montant. Ils sont soumis au régime des plus-values professionnelles.
Intégration fiscale : répartition de la charge d’IS dans les conventions d’intégration
(CAA Lyon Sté Wolseley Centers France n°05-1975, 5e ch., du 2 avril 2009)
Selon la Cour Administrative d’Appel de Lyon, ne constitue pas une subvention versée par la société mère, l’écart entre la contribution d’IS réclamée aux filiales calculée au prorata de leurs résultats, et le montant de l’IS dont elles auraient été redevables si elles avaient été imposées séparément. Les dispositions du CGI (art. 223 A) ne règlent pas les conditions de répartition de la charge d’impôt entre la société mère et ses filiales qui, dans le silence de la loi, sont par conséquent libres de prévoir les modalités de cette répartition dans une convention d’intégration.
Ainsi, l’administration n’est pas en droit d’appliquer l’amende de 5% (art. 1734 bis du CGI) applicable en cas de défaut de mention de sommes correspondantes sur l’état des subventions. L’administration s’est pourvue en cassation contre cet arrêt, qui à défaut d’une décision contraire du Conseil d’Etat, a une portée générale. En effet, sous réserve de la préservation des intérêts des actionnaires ou associés minoritaires, tous les modes de répartition de l’impôt dans le cadre d’une intégration fiscale devraient être admis.
ENTREPRISES EN DIFFICULTE
Inopposabilité de la forclusion à un créancier étranger muni d’une sûreté publiée
(Cass. com., 7 juillet 2009, pourvoi n°07-17.028)
A l’occasion de l’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 3 juin 2009, le dispositif de protection des créanciers munis de sûretés publiées et son amélioration par la réforme de 2005 a été rappelé : la notification personnellement adressée à chacun desdits créanciers reste nécessaire et le délai de forclusion court désormais à compter de la réception de cette notification (cf. nouvel article L.622-24 du code de commerce). L’arrêt du 7 juillet 2009 rendu par la même chambre rappelle, d’une part, les dispositions spéciales, prévues par la législation française et, d’autre part, celles applicables aux créanciers hors France métropolitaine et celles prévues par le règlement européen n° 1346/2000 du Conseil du 29 mars 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité et applicables aux créanciers étrangers.
Ainsi, la Cour rappelle que le délai de déclaration de la créance, ordinairement de deux mois, est augmenté de deux mois supplémentaires pour les créanciers qui ne demeurent pas en France métropolitaine – si la procédure est ouverte sur ce territoire. Cette décision est rendue sous le régime de la loi de 1985 mais la solution reste valable sous le nouveau régime comme le rappelle le deuxième alinéa de l’article R.622-24 du code de commerce. La Cour rappelle également qu’aux termes de l’article 42 du règlement précité, si l’avertissement personnel délivré aux créanciers munis de sûretés publiées doit être rédigé dans la ou dans une des langue(s) officielle(s) de l'État d'ouverture, un formulaire portant, dans toutes les langues officielles des institutions de l'Union européenne, le titre « Invitation à produire une créance. Délais à respecter », doit être utilisé.
Dispense d’inscription modificative en cas de transfert des sûretés au cessionnaire
(Cass. com., 7 juillet 2009, pourvoi n°08-17.275)
L’arrêt rendu le 7 juillet 2009 par la chambre commerciale de la Cour de cassation affirme dans un attendu de principe que le créancier bénéficiant d’un nantissement sur un fonds de commerce en garantie du remboursement du crédit consenti pour l’acquisition de ce même fonds verra cette sûreté maintenue en cas de cession arrêtée dans le cadre d’un redressement judiciaire, sans qu’une inscription modificative soit nécessaire. Un précédent arrêt de la même formation, rendu le 3 février 1998, semblait pourtant indiquer une solution contraire : le créancier nanti devait procéder à une inscription consécutivement au transfert de la charge de la sûreté au cessionnaire. A défaut, la sûreté s’éteignait, et avec elle le cautionnement, la caution ne pouvant plus bénéficier d’une subrogation (article 2314 du code civil). Il faut cependant distinguer les deux arrêts : le créancier ne semble bénéficier de la dispense dans hypothèse où il bénéficie d’un droit de suite. C’est le cas pour un nantissement sur le fonds de commerce (2009, C. com. art. L. 143-12, pas nécessairement pour le nantissement sur l’outillage (1998, C. com. art. L. 525-7).
Commerce électronique et procédures collectives : protection du consommateur
(Forum des droits sur l’internet, communiqué du 16 juillet 2009)
Suite à la liquidation judiciaire de plusieurs sites marchands, fin 2008, le gouvernement a chargé la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (FEVAD) d’élaborer des propositions de loi protégeant les cyberconsommateurs. Ainsi, le 18 décembre 2008, deux projets de loi ont été déposés devant l’Assemblée : le premier vise à protéger la clientèle des ventes à distance (PPL n°1339 AN), le second à protéger les consommateurs contre la faillite des sociétés de vente par correspondance (PPL n°1342 AN).
Par ailleurs, le Forum des droits sur l’internet a mis en place un groupe de travail sur ce dernier thème ; outre un renforcement de l’information (sur les sites des « officiels » comme Infogreffe ou la DGCCRF mais aussi les sites marchands), une kyrielle de solutions techniques a été proposée : accès aux éléments techniques du site pour les liquidateurs qui leur permettraient de le modifier, déréférencement sur les sites comparateurs de prix, fermeture des pages de validation de commande … A suivre.
CONTRATS COMMERCIAUX
Pas d’obligation de mise en garde du banquier en l’absence de risque d’endettement
(Cass. com., 7 juillet 2009, pourvoi n°08-18.251)
On le sait, le professionnel du crédit est tenu à l’égard de l’emprunteur profane d’une obligation de mise en garde. Cette obligation implique que le banquier se renseigne sur la situation financière de l’emprunteur pour lui accorder un crédit adapté et qu’il l’alerte sur le risque de l’endettement né de l’octroi du prêt.
Dans un arrêt de principe récent, la première chambre civile de la Cour de cassation est venue apporter un tempérament de taille à cette obligation en la limitant à l’hypothèse où il existe un risque d’endettement né de l’octroi du prêt (Cass. civ. 1ère, 18 février 2009, pourvoi n°08-11.221).
L’arrêt commenté émane de la chambre commerciale, laquelle opère un revirement et fait sienne la jurisprudence de la première chambre civile puisqu’elle affirme, de manière explicite que « la banque, en l’absence d’un tel risque, (n’est) pas tenue à l’égard (des emprunteurs) d’un devoir de mise en garde ». La chambre commerciale précise, par ailleurs, que le caractère éventuellement inadapté du prêt par rapport aux ressources de l’emprunteur s’apprécie au moment de l’octroi du prêt. L’évolution de la situation financière des emprunteurs liée, en l’espèce à leur divorce et au licenciement de l’un deux, est donc indifférente.
Chèque non présenté au paiement, défaut de provision et action en résolution
(Cass. civ. 3ème, 1er juillet 2009, pourvoi n°07-19.446)
En l’espèce, le vendeur de plusieurs lots de copropriété avait assigné l’acheteur pour défaut de paiement du prix, bien qu’un chèque lui avait été remis lors de la vente. Les juges du fond ayant fait droit à sa demande, l’acheteur forma un pourvoi et faisait valoir que le défaut d’encaissement du chèque devait être reproché au vendeur qui ne l’avait pas présenté au paiement. On sait en effet que la remise d’un chèque ne vaut paiement que sous la condition de son encaissement et l’action en résolution du contrat pour non paiement du prix ne peut prospérer que si le défaut d’encaissement peut être reproché au tireur du chèque. Mais en l’espèce, le vendeur qui, certes, n’avait pas présenté le chèque au paiement, avait reporté la preuve que le compte sur lequel le chèque avait été tiré n’avait jamais présenté, ni à la date d’émission, ni pendant l’année suivante, un crédit suffisant pour honorer la provision. De son côté, l’acheteur n’était pas parvenu à démontrer qu’il bénéficiait d’une ouverture de crédit. Ce faisant, la Cour de cassation a considéré que le prix de vente n’avait pas été payé par la faute de l’acheteur, la résolution du contrat pouvant alors être prononcée à ses torts. Ce faisant, la Cour réfute l’argument selon lequel le porteur du chèque ne peut apporter la preuve de l’absence de provision qu’en le présentant au paiement.
Prêt et point de départ de la prescription
(Cass. civ. 1ère, 11 juin 2009 et 9 juillet 2009, pourvois n°08-11.755 et 08-10.820)
Dans deux arrêts rendus à quelques semaines d’intervalle, la première chambre civile de la Cour de cassation a statué sur le point de départ de la prescription en matière de prêt d’argent. Dans l’arrêt du 11 juin 2009, elle précise que la prescription de l’action en nullité de la stipulation de l’intérêt conventionnel engagée par le consommateur ou le non professionnel en raison d’une erreur affectant le TEG court, de même que l’exception de nullité d’une telle stipulation contenue dans un acte de prêt ayant reçu un commencement d’exécution, à compter du jour où l’emprunteur a connu ou aurait dû connaitre cette erreur, donc soit à la date de la convention lorsque son examen permet de constater l’erreur, soit à la date de la révélation de celle-ci à l’emprunteur. Dans le second arrêt du 9 juillet dernier, il s’agissait d’une action en responsabilité engagée par les emprunteurs contre la banque et la Cour énonce que la prescription d’une telle action court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas en précédemment connaissance.
CONCURRENCE ET DISTRIBUTION
Non-réalisation des prévisionnels par la faute du franchisé
(T. com. Nevers, 22 juillet 2009, R.G. n°2008-000447)
Les demandes de nullité du contrat de franchise fondées sur le caractère trompeur des comptes prévisionnels ne sont pas rares et aboutissent parfois lorsqu’il est établi que ces comptes sont lourdement erronés.
L’annulation du contrat de franchise en cas de différence, même importante, entre le chiffre d’affaires prévisionnel et le chiffre d’affaires réalisé, n’est pas pour autant automatique. En effet, la non-réalisation du chiffre d’affaires prévisionnel n’a pas nécessairement pour cause le manque de sérieux des comptes prévisionnels, mais peut provenir de la faute du franchisé, ainsi que vient de le rappeler le Tribunal de commerce de Nevers. En premier lieu, le Tribunal relève que la surface de vente du franchisé était inférieure à celle pour laquelle les comptes prévisionnels avaient été établis, et ce en raison de la seule faute du franchisé qui n’avait pas effectué les démarches nécessaires afin d’obtenir l’autorisation d’exploiter.
En second lieu, le tribunal considère que la non-réalisation du prévisionnel est due au manque de professionnalisme et de compétence du dirigeant, qui ressort notamment de la différence entre le taux de fréquentation du magasin et les achats qui y sont effectués.
Mise en œuvre de l’article 145 du CPC et concurrence déloyale
(Cass. civ. 2ème, 2 juillet 2009, pourvoi n°07-20.968)
L’article 145 du code de procédure civile permet à tout intéressé d’obtenir du juge qu’il ordonne des mesures d'instruction, à la double condition que la procédure soit mise en œuvre avant tout procès et qu’il existe un motif légitime « de conserver ou d'établir (…) la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige ».
Cet article peut, selon le cas, être invoqué dans le cadre d’une assignation en référé (procédure contradictoire) ou dans une requête (procédure non contradictoire). L’arrêt commenté, rendu dans une affaire où le franchiseur avait obtenu sur requête la désignation d’un huissier aux fins de prouver les actes de concurrence déloyale commis par son franchisé, rappelle certains principes relatifs à l’action fondée sur l’article 145 du CPC.
La Cour relève en premier lieu que « l’urgence n’est pas une condition requise pour que soient ordonnées sur requête des mesures d’instruction », rappelant ainsi le principe établi il y a plus de vingt-cinq ans par la Chambre Mixte (Cass. ch. Mixte, 7 Mai 1982, 3 arrêts, pourvois n°79-11.814, 79-11.974 et 19-12.006).En deuxième lieu, la Cour rappelle que l’existence du motif légitime relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.
Enfin, la Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir considéré que le principe de la procédure contradictoire devait être écarté, en l’espèce « les mesures d’investigation étaient une condition nécessaire et indispensable à l’efficacité des recherches et éléments de nature à établir des actes de concurrence déloyale ».
Obligation de reclassement au sein d’un réseau de franchise
(Cass. soc., 7 juillet 2009, pourvoi n°08-40.689)
La Cour de cassation a rappelé récemment que l’indépendance réciproque des membres d’un réseau de franchise ne fait pas par principe obstacle à ce que ce réseau constitue un groupe au sein duquel le reclassement du salarié doit être recherché, et que les juges du fond doivent rechercher, au cas par cas, s’il existe des permutations de personnel entre les membres du réseau.
En l’espèce, la Cour de cassation a approuvé la Cour d’appel d’avoir condamné le franchisé, ayant constaté, d’une part, que celui-ci était «membre d’un groupement d’entreprises liées par des intérêts communs et des relations étroites consistant notamment dans des permutations de personnel» et, d’autre part, qu’il n’avait pas cherché à reclasser son employé.
PERSONNES ET PATRIMOINE
La future création de l’entreprise à patrimoine affecté
(http ://www.etudes.ccip.fr)
Un projet de loi, tendant à créer un nouveau système de protection des entrepreneurs individuel, baptisé « entreprise à patrimoine affecté » a été présenté au conseil des ministres le 24 juillet dernier. Rappelons qu’à l’heure actuelle, les entrepreneurs en nom propre, dont le nombre dépasse 1,3 millions en France, répondent de leurs engagements sur la totalité de leur patrimoine présent et futur.
Ce projet s’inscrit dans un contexte politique tourné vers le développement des alternatives à l’entrepreneuriat individuel classique et vise à mettre fin à l’inégalité entre entrepreneurs constitués en société et artisans. Le dispositif envisagé, qui pourrait prendre effet au printemps 2010, est le suivant : l’artisan, au moment de son inscription au registre des métiers, fournira la liste du patrimoine qu’il décide d’affecter à son activité. Ce document sera alors opposable aux tiers, notamment aux créanciers en cas de faillite.
La Chambre de commerce et de l’industrie de Paris (CCIP) a publié sur son site un rapport sur ce projet. Si elle perçoit l’intérêt de ce nouvel outil offert aux créateurs pour organiser leur patrimoine, elle a insisté, notamment, sur la nécessité de garantir une séparation stricte des patrimoines et un équilibre entre les créanciers personnels et professionnels. En effet, dans le texte actuel, il est prévu qu’en cas d’insuffisance du patrimoine personnel, les créanciers pourront se payer sur les biens qui constituent le patrimoine affecté. Autrement dit, ils pourront ne pas tenir compte de l’affectation et se comporter comme s’ils avaient, face à eux, un patrimoine unique, alors que cette possibilité est expressément refusée aux créanciers professionnels.
La CCIP a également attiré l’attention des pouvoirs publics sur les risques de dérive que ce mécanisme pourrait susciter et a proposé que le gouvernement présente un rapport d’évaluation sur l’utilisation de l’ensemble du dispositif, une année après son entrée en vigueur.
La notion de créancier professionnel dans le cautionnement
(Cass. civ. 1ère, 9 juillet 2009, pourvoi n°08-15.910)
Par un arrêt du 9 juillet 2009, la première chambre civile de la Cour de cassation est venue préciser la notion de créancier professionnel dans le cadre d’un cautionnement.
En l’espèce, une SA avait cédé les parts qu’elle détenait dans le capital d’une autre société et le solde du compte courant d’associé détenu dans cette société par la SA avait été converti en un prêt consenti par celle-ci à celle-là aux termes d’un acte sous seing privé. Un actionnaire de la société emprunteuse s’était porté caution du remboursement de ce prêt selon le même acte.
En raison de la défaillance de la société débitrice, la SA a assigné en paiement la caution qui a invoqué la nullité de son engagement faute pour celui-ci de contenir les mentions manuscrites impérativement prescrites par les articles L.341-2 et L.341-3 du code de la consommation. Sa demande fut accueillie par les juges du fond.
La Cour de cassation rejette le pourvoi en indiquant qu’après avoir exactement retenu qu’au sens des articles précités le créancier professionnel s’entend de celui dont la créance est née dans l’exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l’une de ses activités professionnelles, même si celle-ci n’est pas principale, la cour d’appel a constaté qu’en procédant à une acquisition de parts d’une société et à un apport en compte courant au bénéfice de cette dernière, la SA avait entendu réaliser un investissement en rapport direct avec une activité de diversification.
Ce faisant, la Haute juridiction approuve la cour d’appel d’avoir jugé que, du chef de la créance née d’un tel investissement, fût-il accessoire au regard de son activité principale, la SA devait être regardée comme un créancier professionnel, en sorte que, faute de contenir les mentions manuscrites exigées par ces deux articles, le cautionnement était entaché de nullité.
SOCIAL ET RESSOURCES HUMAINES
Charge de la preuve en matière de discrimination syndicale
(Cass. soc., 1er juillet 2009, pourvoi n°08-40.988)
En vertu de l’article L.1134-1 du code du travail, il appartient à celui qui s’estime victime d’une discrimination de soumettre au juge les éléments de fait laissant supposer l’existence de celle-ci, à charge pour le défendeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Par un arrêt rendu le 1er juillet 2009, la chambre sociale de la Cour de cassation a, au visa de l’article L.1134-1 du code du travail, estimé que suffit à laisser supposer l’existence d’une discrimination syndicale, le fait que les fiches d’évaluation individuelle d’un salarié qui n’avait bénéficié d’aucune promotion individuelle depuis 1987, mentionnent ses activités prud'homales et syndicales et les perturbations qu'elles entraînaient dans la gestion de son emploi du temps.
Limites du pouvoir du juge dans le cadre du harcèlement moral
(Cass. soc., 1er juillet 2009, pourvoi n°07-44.482)
Selon l’article L. 1152-4 du code du travail, l’employeur doit prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.
Dans cet arrêt, deux salariées d’une association, victimes de faits de harcèlement moral par la directrice de l’établissement, ont saisi le juge de demandes tendant, d’une part, à la condamnation de leur employeur à des dommages-intérêts et, d’autre part, à ce qu’il soit ordonné à ce dernier d’écarter la directrice de ses fonctions.
La Cour de cassation a considéré que « n’entre pas dans les pouvoirs du juge d’ordonner la modification ou la rupture du contrat de travail du salarié auquel sont imputés de tels agissements, à la demande d’autres salariés, tiers à ce contrat ».
Ainsi, il incombe à l’employeur seul et non au juge, de prendre les mesures nécessaires pour prévenir le harcèlement moral et y mettre un terme, afin de respecter son obligation de sécurité qui est une obligation de résultat.
Afin de ne pas risquer d’engager sa responsabilité civile, l’employeur devra donc proposer au salarié la modification de son contrat de travail à titre de sanction disciplinaire et le licencier en cas de refus.
Limites du pouvoir du juge dans le cadre de la mise en œuvre de la réorganisation
(Cass. soc., 8 juillet 2009, pourvoi n°08-40.046)
Aux termes de cet arrêt, la Haute Juridiction a censuré un arrêt de la Cour d’Appel de Paris qui avait considéré qu’un licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que l’employeur ne justifiait pas de l’impact de la fermeture d’un service pour remédier au déficit globalement enregistré par l’entreprise.
La Cour de cassation, rappelant ainsi une jurisprudence constante en la matière, a estimé que « s’il appartient au juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l’adéquation entre la situation économique de l’entreprise et les mesures affectant l’emploi ou le contrat de travail envisagés par l’employeur, il ne peut se substituer à ce dernier quant au choix qu’il effectue dans la mise en œuvre de la réorganisation ».
IMMOBILIER
Conséquence du défaut d’obligation contractuelle d’exploiter un fonds de commerce
(Cass. civ. 3ème, 10 juin 2009, pourvois n°08-14.422 et 07-18.618)
Par deux arrêts du même jour, la Cour de cassation vient de rappeler l’importance des stipulations contractuelles dans un bail commercial. Deux bailleurs avaient assigné leur preneur respectif pour voir prononcer la résiliation de leur bail au motif que ces derniers n’exploitaient plus les locaux loués. Les juges du fond ont logiquement fait droit à la demande des bailleurs, estimant que l’exploitation du fonds de commerce constituait une obligation essentielle du contrat de bail et une condition de son renouvellement.
La Cour de cassation censure au motif qu’en l’absence de clause contractuelle imposant l’obligation d’exploiter les lieux loués, le défaut d’exploitation effective par les preneurs ne pouvait constituer un manquement aux clauses du bail et entrainer sa résiliation. L’insertion d’une telle clause dans le bail devra donc être systématiquement prévue. Pourtant, on aurait pu croire, comme l’ont justement fait les juges du fond, que l’obligation d’exploiter les lieux loués participait de l’économie du contrat de bail commercial.
Référé expertise en matière de baux commerciaux et prescription biennale
(Cass. civ. 3ème, 8 juillet 2009, pourvoi n°08-13.962)
Par acte du 27 avril 2001, des bailleurs avaient donné à leur preneur congé avec offre de paiement d’une indemnité d’éviction. Par ordonnance en date du 9 janvier 2002, le juge des référés a désigné un expert afin d’évaluer le montant de l’indemnité d’éviction. Ce n’est pourtant que par conclusions en date du 26 avril 2004, soit plus de 2 ans après l’ordonnance de référé, que le preneur a demandé pour la 1ère fois le paiement d’une indemnité d’éviction. Les bailleurs ont invoqué la prescription de cette demande en application de l’article L.145-60 du code de commerce.
Les juges du fond, approuvés par la Cour de cassation, ont estimé que la demande du preneur était tardive dès lors qu’elle intervenait plus de deux ans après l’ordonnance de référé ayant fait courir un nouveau délai de 2 ans.
La solution, bien que sévère, est constante : en cas de refus de renouvellement avec offre d’indemnité d’éviction, l’action en fixation du montant de cette indemnité doit être intentée par le preneur dans les deux ans à compter de l’ordonnance de référé ayant désigné l’expert.
Obligation d’information du bailleur et renouvellement de bail
(Cass. civ. 3ème, 24 juin 2009, pourvoi n°08-12.251)
Un preneur ayant réalisé dans les lieux loués une mezzanine sans autorisation administrative mais avec l’accord du bailleur, s’est vu délivrer deux avis défavorables à l’exploitation de l’établissement par la commission de sécurité, avec fermeture administrative des locaux jusqu’à leur mise en conformité. Pour autant, le preneur décide de céder son fonds de commerce. Le bailleur saisit l’occasion pour régulariser un renouvellement de bail. Le cessionnaire informé de la situation, obtient en justice l’annulation de la transaction pour dol. Le bailleur quant à lui poursuit le cessionnaire en paiement des loyers échus et, à titre subsidiaire, d’une indemnité d’occupation. Le cessionnaire a opposé la nullité de la cession, et partant, celle du bail et a sollicité la condamnation du bailleur pour défaut de loyauté.
Les magistrats, approuvés par la Cour de cassation, ont fait droit à la demande du cessionnaire. Ils ont, en effet, estimé, que le bailleur avait commis une faute délictuelle en s’abstenant délibérément d’informer le cessionnaire de la non-conformité des locaux loués, au moment du renouvellement du bail. Le bailleur n’était donc pas condamné du fait de la cession dolosive du fonds de commerce, aucune obligation d’information ne lui incombant, mais en raison de son défaut de loyauté lors du renouvellement du bail, renouvellement qui constitue, selon la Cour de cassation, un nouveau bail. Le cessionnaire est toutefois condamné à payer au bailleur une indemnité d’occupation pour la période durant laquelle il a eu la jouissance des locaux.
PROCEDURE CIVILE ET VOIES D’EXECUTION
La compétence du juge de l’exécution
(Cass. civ. 2ème, 18 juin 2009, pourvoi n°08-10.843)
Selon l’article L.213-6 du code de l’organisation judiciaire, « le juge de l’exécution connait, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée même si elles portent sur le fond du droit à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire ».
Dans son arrêt du 18 juin 2009, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en admettant que le juge de l’exécution puisse apprécier la validité d’un engagement résultant d’un acte notarié exécutoire.
Pourtant, selon la jurisprudence établie par un arrêt du 16 juin 1995, la Cour de cassation énonçait clairement que le juge de l’exécution ne pouvait se prononcer sur la nullité d’un engagement résultant d’un tel acte. Elle penchait ainsi du côté d’une interprétation stricte du champ d’intervention du juge de l’exécution. La juridiction du fond était, jusqu’alors, seule compétente.
Ainsi, en application de l’article précité, la compétence du juge de l’exécution s’étend, à l’examen de la validité d’un engagement résultant d’un acte notarié lorsque le demandeur soutient que les conditions requises pour sa validité ne sont pas remplies en raison d’un dol.
L’interruption du délai de forclusion par la saisine d’un juge incompétent
(Cass. civ. 1ère, 9 juillet 2009, pourvoi n°08-16.847)
Selon l’article 2219 du code civil, « la prescription est un moyen d’acquérir ou de se libérer par un certain laps de temps, et sous les conditions déterminées par la loi ».
La prescription est une fin de non-recevoir qui éteint l’action. Ainsi, au bout d’un certain délai, la demande est dite irrecevable, le demandeur est alors forclos. Toutefois ce délai peut être interrompu ou suspendu.
À ce titre, par un arrêt en date du 9 juillet 2009, la Cour de cassation a confirmé un arrêt de revirement de chambre mixte du 24 novembre 2006 (Bull. mixte, 2006, n°11) en considérant que « la citation en justice donnée même devant un juge incompétent interrompt la prescription » etce, quels que soient les délais pour agir et les cas d’incompétence, notamment, en matière de crédit à la consommation, le délai biennal de forclusion de l’article L.311-37 du code de la consommation.
La solution adoptée vaut ainsi pour tous les délais pour agir, qu’il s’agisse des délais de prescription ou des délais préfix, mais également pour tous les cas d’incompétence, qu’il s’agisse d’une incompétence d’attribution ou d’une incompétence territoriale.
L’appel et la compétence du conseiller de la mise en état
(Cass. civ. 1ère, 8 juillet 2009, pourvoi n°08-17.401)
Par un arrêt du 8 juillet 2009, la Cour de cassation a énoncé que le conseiller de la mise en état, dont les attributions ne concernent que les exceptions de procédure et les incidents relatifs à l’instance d’appel, n’est pas compétent pour statuer sur une exception de procédure relative à la première instance.
Cette solution rappelle que le conseiller de la mise en état n’est pas juge d’appel des décisions de première instance et que, pour cette raison, les exceptions qui relèvent des attributions du conseiller de la mise en état sont celles pendantes devant la cour d’appel et non celles relatives à la procédure de première instance.
PROPRIETE INTELLECTUELLE
Le droit moral de l’auteur d’une œuvre d’architecture
(Cass. civ. 1ère, 11 juin 2009, pourvoi n°08-14.138)
Le droit moral de l’auteur lui permet de faire respecter l’intégrité de son œuvre et, partant, de s’opposer à toutes modifications de celle-ci, y compris lorsqu’elles sont le fait du propriétaire de l’oeuvre. Ce principe ne va pas sans soulever des difficultés pratiques, notamment lorsqu’il s’agit d’œuvres d’architecture.
Dans les faits ayant conduit à l’arrêt commenté, l’architecte d’un bâtiment arguait de son droit moral pour contester les extensions opérées par le propriétaire du bâtiment. La Cour d’appel avait accueilli la demande d’indemnisation formulée par l’architecte faute pour le propriétaire d’avoir sollicité l’autorisation préalable de l’auteur ce, alors même que les travaux avaient été réalisés pour adapter les locaux à ses besoins nouveaux. Une telle solution est désapprouvée par la Cour de cassation illustrant la nécessité de rechercher un équilibre entre les droits de chacun.
La Cour pose le principe selon lequel l’auteur doit accepter certaines modifications : « Attendu que la vocation utilitaire d’un bâtiment commandé à un architecte interdit à celui-ci de prétendre imposer une intangibilité absolue de son œuvre à laquelle le propriétaire est en droit d’apporter des modifications lorsque se révèle la nécessité de l’adapter à des besoins nouveaux... », et y apporte immédiatement une limite : « ... qu’il importe néanmoins pour préserver l’équilibre entre les prérogatives de l’auteur et celles du propriétaire, que ces modifications n’excèdent pas ce qui est strictement nécessaire et ne soient pas disproportionnées au but poursuivi ».
La Cour invite donc les juges du fond à apprécier le caractère nécessaire et proportionné au but poursuivi par le propriétaire des modifications pour apprécier l’atteinte portée au droit moral de l’auteur de l’oeuvre d’architecture.
Le respect des droits de la personnalité de l’auteur
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