Dossiers de la franchise
La Lettre du Cabinet, Décembre 2008
La fin de l'année est marquée à la fois pas d'importantes décisions rendues par la Cour de cassation ainsi que par une série d’ordonnances et autres communiqués du gouvernement intéressant tout particulièrement nos domaines d’activités.
Il nous est apparu essentiel de vous présenter, dans notre libre propos, les réponses apportées par le ministère de l’économie aux nombreuses interrogations suscitées par les dispositions de la LME relatives aux nouveaux délais de paiement.
En droit des sociétés, la Haute juridiction renforce les obligations pesant sur le cédant ayant garanti l’exactitude des comptes de références de la société cédée tandis qu’elle atténue sa position sur les conditions de révocation du directeur général. Le droit des entreprises en difficultés offre une actualité riche avec la publication de l’Ordonnance du 18 décembre 2008 reformant sensiblement la procédure de sauvegarde mise en place par la loi du 26 juillet 2005.
Dans les autres domaines du droit, on retiendra l’actualité du droit social (avec la proposition de loi sur le repos dominical), du droit immobilier (qui réserve des solutions décisives en matière de congé pour reprise et d’application du statut des baux commerciaux) et du droit de la propriété artistique et industrielle (qui nourrit la question des œuvres conceptuelles).
En ce qui concerne l’actualité du cabinet, notre équipe s’agrandit avec l’arrivée de Sophie Reygrobellet au sein de notre bureau région Rhône-Alpes et de François Michelet au sein de notre cabinet parisien.
Bonne lecture et meilleurs vœux à tous !
Jean-Charles Simon Avocat associé
François-Luc Simon Avocat associé
LIBRE PROPOS
Précisions sur les nouveaux délais de paiement issus de la loi du 4 août 2008(Article 21 de la loi n°2008-776 du 4 août 2008, JO du 5 août 2008)
L’instauration par l’article 21 de la loi du 4 août 2008, dite « LME », d’un nouveau plafond légal de paiement entre entreprises constitue l’un des apports majeurs de la réforme. Censée favoriser le développement des PME en desserrant la contrainte financière qui s’applique à elles et en améliorant les fonds de roulement, cette disposition a suscité de nombreuses interrogations chez les opérateurs, ce qui a conduit le ministère à publier sur le site de la DGCCRF un communiqué sur les modalités d’application du plafonnement des délais de paiement. Ce dernier apporte un éclairage utile et nécessaire sur les nouveaux délais de paiement (1) et leur champ d’application (2).
1/ - Les nouveaux délais de paiement
La loi a fixé un principe (a) dont l’inobservation est sanctionnée (b), et auquel il est possible de déroger, sous certaines conditions, par des accords interprofessionnels (c).
a/ - Le principe
La LME a introduit une nouvelle disposition interdisant que les délais de règlement convenus entre les parties puissent dépasser 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d’émission de la facture. Le choix relève de la liberté contractuelle des opérateurs, étant précisé que pour les opérateurs soumis à l’établissement d’une convention unique, celle-ci devra mentionner ce choix.
Le point de départ du délai est donc la date d’émission de la facture, l’article L.441-3 imposant à cet égard que la facture soit délivrée dès la réalisation de la vente ou de la prestation de services. Toutefois le point de départ peut être la date de réception des marchandises ou d’exécution de la prestation des services si des accords entre les organisations professionnelles concernées le prévoient. Ce choix de point de départ ne doit néanmoins pas conduire à un délai final supérieur à 60 jours calendaires ou 45 jours fin de mois à compter de la date d’émission de la facture.
S’agissant de la computation du délai de « 45 jours fin de mois », la pratique consiste à comptabiliser les 45 jours à compter de la date d’émission de la facture, la limite de paiement intervenant à la fin du mois civil au cours duquel expirent ces 45 jours. Toutefois, le ministère est venu préciser qu’il est également envisageable de comptabiliser les délais d’une autre façon, consistant à ajouter 45 jours à la fin du mois d’émission de la facture.
b/ - Les sanctions
Si le dépassement des nouveaux plafonds n’est pas pénalement sanctionné, l’article L.442-6 7° sanctionne civilement le fait de soumettre un partenaire à des conditions de règlement qui ne respectent pas le plafond légal ainsi que le fait pour le débiteur, de demander au créancier, sans raison objective, de différer la date d’émission de la facture. En outre, dans les sociétés dont les comptes sont certifiés, le commissaire aux comptes a l’obligation de rédiger un rapport. Ces rapports concourront à l’élaboration des programmes d’enquête de la DGCCRF.
La loi tend également à sanctionner plus durement le débiteur qui ne s’acquitterait pas de son obligation de paiement dans le délai. En effet, elle prévoit que le taux d’intérêt des pénalités de retard est égal au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage (contre 7 points antérieurement à la loi) et que les parties ne peuvent convenir d’un taux inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal (contre une fois et demie antérieurement à la loi).
c/ - Les dérogations
Afin d’amortir le choc que provoquerait la réduction brutale du délai dans certains secteurs, la loi permet aux organisations professionnelles de conclure des accords dérogeant au plafond légal, mais à des conditions restrictives : l’accord interprofessionnel doit être conclu avant le 1er mars 2009 ; le dépassement du délai légal doit être motivé par des raisons objectives et spécifiques au secteur – notamment au regard des délais de paiement constatés dans le secteur en 2007 ou de la situation particulière de rotation des stocks ; l’accord doit prévoir la réduction progressive des délais dérogatoires en vue de leur alignement sur le délai légal et sa durée ne peut dépasser le 1er janvier 2012.
L’administration contrôle si les conditions prévues par la loi sont remplies. Dans l’affirmative, un projet de décret validant l’accord est transmis au Conseil de la concurrence pour avis. Enfin, le ministre prend sa décision. A ce jour, la DGCCRF a transmis au Conseil de la concurrence, pour examen, six accords interprofessionnels.
Les organisations professionnelles désireuses de conclure un accord dérogatoire doivent en informer la DGCCRF. Dans son communiqué officiel, le ministère a décidé que seuls les accords conclus avant le 1er janvier 2009 ne donneront pas lieu à contrôle dans l’attente de la décision du ministre d’homologuer ou non. Pour le reste, la loi est donc d’application le 1er janvier 2009.
2/ - Champ d’application des nouveaux délais de paiement
Le communiqué du ministère apporte des précisions sur les conditions d’application matérielle (a), dans le temps (b) et dans l’espace (c) des nouveaux délais de paiement.
a/ - Application matérielle
A l’exception de certains secteurs qui demeurent soumis à des délais spécifiques (transport de marchandises, produits alimentaires périssables et boissons alcoolisées), le nouveau plafond légal s’applique à tout producteur, commerçant, industriel ou artisan, à l’exclusion des non professionnels. Le nouveau plafond légal s’applique également à tous les produits et services, la loi n’opérant pas de distinction.
b/ - Application dans le temps
La LME prévoit que les dispositions relatives aux nouveaux délais de paiement « s’appliquent aux contrats conclus à compter du 1er janvier 2009 » et « aux appels de commandes postérieurs au 1er janvier 2009 » dans le cas des commandes dites « ouvertes » où le donneur d’ordre ne prend aucun engagement ferme sur la quantité de produits ou sur l’échéancier des prestations ou des livraisons.
De ces dispositions, il faut comprendre que les nouveaux délais s’appliquent :
- aux contrats d’application conclus après le 1er janvier 2009, peu important qu’une convention cadre ait été antérieurement conclue;
- aux commandes conditionnelles ou non encore acceptées à la date du 1er janvier 2009.
- s’agissant des contrats pluriannuels conclus avant le 1er janvier 2009, le ministère de l’Economie est venu préciser que la loi nouvelle s’applique aux contrats tacitement renouvelés et aux contrats contenant une clause de révision des prix, laquelle implique un nouvel accord de volonté, contrairement à une clause d’indexation qui fait varier automatiquement le prix.
c/ - Application dans l’espace
La question se pose de savoir si les délais de paiement maximaux, issus de la loi LME, s’imposent dans le cadre des relations commerciales internationales - c’est-à-dire lorsque le client ou le fournisseur sont établis hors de France - et qu’un droit étranger s’applique au contrat, soit que les parties en ont convenu ainsi, soit qu’il s’applique par défaut au regard des conventions internationales. L’application, dans cette hypothèse, des règles françaises sur les délais de paiement dépend de leur statut de lois de police ou non.
Mais pour l’heure, ni le législateur, ni l’Administration ne se sont prononcés sur cette question. Elle n’a pas davantage été tranchée par la Cour de cassation. Toutefois, leur intégration dans le corps des pratiques restrictives de concurrence par la LME incline à penser qu’elles seront considérées comme des lois de police. En effet, plusieurs décisions ont retenu que l’interdiction de la rupture des relations commerciales établies - laquelle constitue une pratique restrictives de concurrence sanctionnée par l’article L.442-6 du code de commerce - s’impose même lorsque le contrat n’est pas soumis au droit français (pour une application récente : Cass. Com., 21 octobre 2008, pourvoi n°07-12.336). La doctrine majoritaire est également en ce sens. Aussi, il existe une forte probabilité que les délais de paiement issus de la LME soient considérés comme des lois de police qui s’imposent dans les échanges internationaux impliquant une société française.
Conscient des distorsions de concurrence que peut créer la loi entre les entreprises françaises et celles des pays voisins non soumises à ces délais maximaux, le gouvernement français œuvre, dans le cadre de l’élaboration du Small Business Act, pour uniformiser, au sein de l’Union européenne, le délai de paiement à 30 jours (Euractiv.fr 28/08/08).
Sonia VECCHIONE
Avocat à la Cour
CORPORATE ET DROIT DES SOCIÉTÉS
La garantie des comptes de référence(Cass. com., 4 nov. 2008, pourvoi n°07-19.195)
La cession d'actions s'accompagne généralement de garanties conventionnelles, faites au profit du cessionnaire, qui ont un caractère obligatoire au sens de l’article 1134 du code civil.
Ainsi le cédant peut, comme dans notre cas d’espèce, garantir que les comptes de référence sont exacts et donnent une image fidèle de la situation financière du patrimoine et des engagements de la société cédée. Il peut également garantir l'exactitude de ses déclarations et des annexes à l’acte de cession. En outre, il peut s’engager à indemniser le cessionnaire d'un accroissement de passif non inscrit, comptabilisé ou insuffisamment provisionné.
La Cour de cassation considère que la garantie d’exactitude des comptes de référence doit être exécutée strictement.
A ce titre, elle précise que cette garantie doit être mise en œuvre lorsque la cession d’un actif a entraîné une perte comptable non provisionnée bien qu’une évaluation inférieure à cet actif ait été réalisée par le service des domaines antérieurement à la cession. Elle doit également être exécutée lorsque la société cédée doit assumer un risque non provisionné bien que ce risque ait été mentionné dans les annexes de l’acte de cession et que le cessionnaire en ait été préalablement informé.
La Cour de cassation précise également qu’il appartient au juge du fond de rechercher si le fait pour le cédant de refuser de coopérer avec le cessionnaire et la société cédée dans le traitement des difficultés issues de sa gestion ne constitue pas un manquement à l'exigence de bonne foi dans l'exécution du contrat.
Expertise et respect du principe du contradictoire(Cass. com., 4 nov. 2008, pourvoi n°07-18.147)
L’expert qui a été désigné par le Tribunal de commerce pour déterminer le prix définitif de cessions d’actions est tenu de respecter le principe du contradictoire. A ce titre, l’Expert doit notamment informer l’ensemble des parties de la possibilité qui leur est ouverte de présenter des dires ou observations en réponse au pré-rapport, après son établissement et avant le dépôt du rapport définitif. Ainsi, le seul fait de ne pas respecter le principe du contradictoire, suffit à rendre ce rapport irrecevable, même en l’absence de tout grief allégué.
Révocation du Directeur général(Cass. com., 4 nov. 2008, pourvoi n°07-19.303)
Comme le précise l’article L.255-55 du code de commerce, la révocation d'un directeur général peut intervenir à tout moment et n'est abusive que si elle a été accompagnée de circonstances ou a été prise dans des conditions qui portent atteinte à la réputation ou à l'honneur du dirigeant révoqué ou si elle a été décidée brutalement sans respecter le principe de la contradiction.
En l’espèce, le directeur général a été révoqué de ses fonctions et remplacé par son demi-frère au cours d’un Conseil d’administration. Considérant que cette révocation était abusive, le dirigeant révoqué a assigné la société en réparation du préjudice subi.
Pour faire droit à sa demande, la Cour d’appel a retenu que la révocation du directeur général était abusive en raison de son caractère brutal et vexatoire et sans juste motif.
Cependant, la Cour de cassation, après avoir relevé que la Cour d’appel n’a pas pris en compte les circonstances relatées dans le procès-verbal qui témoignaient d’une mésentente au sein de la société, a cassé cet arrêt pour défaut de base légale au regard de l’article précité.
Ainsi, la mésentente entre les membres d’une société justifierait, à elle seule, la révocation du directeur général.
DROIT FISCAL
Impôt de solidarité sur la fortune : dirigeants retraités(Réponse ministérielle, AN, Ginesta, 4 novembre 2008, p.9564, n°1702)
Les dirigeants qui cessent leur activité et transmettent leurs droits sociaux, tout en s’en réservant l’usufruit, devraient en principe être imposés sur la valeur en pleine propriété de ces droits.
L’article 885 O quinquies du CGI déroge à ce principe en prévoyant que le contribuable qui transmet – avec réserve d’usufruit à son profit – les parts ou actions d’une société dont il est dirigeant, peut bénéficier du régime des biens professionnels sur ces titres, à hauteur de la quotité de la valeur en pleine propriété des titres ainsi démembrés correspondant à la nue-propriété.
L’application de l’exonération partielle suppose en principe que la cessation d’activité et le démembrement de propriété soient concomitants. L’administration fiscale admet cependant que le démembrement soit antérieur à la cessation d’activité.
Désormais, le démembrement peut être postérieur à la cessation d’activité sous réserve que la cessation d’activité soit postérieure au 1er janvier et que le démembrement intervienne au plus tard le 31 décembre de cette même année. Cette mesure a été prise afin de favoriser la transmission des entreprises.
Apport-donation : pas d’abus de droit selon la Cour de cassation(Cass.com., 4 novembre 2008, pourvoi n° 07-19.870)
La Cour de cassation devait se prononcer sur un montage dans lequel une mère, son fils et ses deux petits-enfants avaient constitué une SCI. Ces deux derniers avaient apporté chacun une somme en numéraire tandis que les deux premiers avaient fait apport de la nue-propriété de divers biens immobiliers indivis. Cinq mois plus tard, la mère avait fait donation à ses associés de la totalité de ses parts de la société.
Invoquant l’abus de droit, l’administration fiscale estimait que cette opération dissimulait une donation directe de la nue-propriété qui avait eu pour but exclusif d’éluder les droits de mutation à titre gratuit.
La Cour de cassation a estimé que la création d’une SCI suivie de la donation de parts ne constitue pas une opération purement fiscale (l’objet de la société était d’acheter et de gérer des immeubles) constitutive d’un abus de droit dès lors qu’elle permet d’assurer le maintien du patrimoine dans la même famille.
La CJCE précise la notion « d’assujetti à la TVA »(CJCE 6 novembre 2008, affaire C-291/07, Kollektivavtalsstifelsen TTR Trygghetsrsadet)
Le lieu d’une prestation de services est réputé se situer à l’endroit où le prestataire a établi le siège de son activité économique ou un établissement stable à partir duquel la prestation de services est rendue.
La question de la qualité du preneur de la prestation (versement d’indemnités de licenciement, etc) était posée à la Cour pour des prestations de services de conseil commandées à un prestataire établi au Danemark, afférentes à l’activité exercée par un organisme suédois.
La CJCE, après avoir relevé l’absence de précision explicite sur ce point à l’article 9 de la sixième directive quant au fait que les services fournis doivent être utilisés pour les besoins de l’activité économique du preneur, décide que le fait d’utiliser des services pour des activités hors champ ne fait pas obstacle à l’application de la règle de territorialité en matière de TVA prévue pour les prestations de services. Le preneur d’une prestation de services exerçant à la fois des activités économiques et des activités hors champ doit donc être considéré comme un assujetti.
ENTREPRISES EN DIFFICULTÉS
Droit des entreprises en difficultés : une nouvelle reforme(Ordonnance n°2008-1345 du 18 décembre 2008, JO du 19 décembre 2008)
L’ordonnance n°2008-1345 du 18 décembre 2008 portant reforme des entreprises en difficultés a été publiée au journal officiel le 19 décembre 2008.
Cette reforme, annoncée depuis 2007, vient modifier sensiblement les dispositions issues de la Loi de sauvegarde du 26 juillet 2005, et principalement celles relatives à la procédure de sauvegarde. L’objectif du gouvernement est de favoriser davantage le traitement anticipé des difficultés d’une entreprise.
Tel était également l’objectif du législateur de 2005 qui avait institué la procédure de sauvegarde, procédure collective réservée aux sociétés in bonis.
Néanmoins certaines dispositions originelles rendaient peu attractif le recours à la procédure de sauvegarde.
L’ordonnance du 18 décembre 2008 apporte une kyrielle de modifications de nature à inciter le dirigeant à recourir, si besoin est, à la procédure de sauvegarde : suppression de la référence à l’état de cessation des paiements, possibilité pour le débiteur de proposer le nom d’un administrateur, surpression de l’éviction du dirigeant et de la cession forcée des titres de capital, traitement différencié des créanciers…
Compte tenu des modifications apportées par l’ordonnance, l’entrée en vigueur, initialement prévue le 1er janvier 2009, a été fixée au 15 février 2009.
Reforme des inscriptions des privilèges fiscaux et sociaux(Article 31 ter du projet de loi de finances rectificative pour 2008)
Un amendement au projet de loi de finances rectificative pour l’année 2008 voté le 11 décembre 2008 prévoit la modification du régime des inscriptions des privilèges dont bénéficient les créances fiscales et sociales.
En effet, le délai à partir duquel le privilège doit être inscrit passerait de six mois à neuf mois (à compter de la date d’exigibilité de la créance).
Bien plus, la publicité ne serait plus requise lorsque le débiteur respecte un plan d’apurement - tel que celui accordé par le CCSF - et paie ses créances courantes.
Ces modifications, dictées par la conjoncture économique actuelle, constituent le prolongement des reformes en la matière issues de la Loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 et du décret du 5 février 2007.
Une créance litigieuse n’est pas comprise dans le passif exigible(Cass. com., 25 novembre 2008, pourvoi n°07-20972)
La solution dégagée par cet arrêt n’est pas nouvelle (Cass. Com., 22 février 1994, n°92-11634). Toutefois, les décisions rendues par la Cour suprême ne sont pas fréquentes.
La Cour de cassation rappelle, à l’occasion de cet arrêt, que dès lors que le bien fondé d’une dette est débattu dans le cadre d’une instance au fond, celle-ci est litigeuse et ne doit donc pas être prise en compte pour la détermination du passif exigible.
Cet arrêt est également l’occasion de revenir sur la modification de la notion d’état de cessation des paiements issue de l’ordonnance du 18 décembre 2008. Il a été inséré à l’alinéa 1er de l’article L.631-1 du code de commerce la mention suivante : « le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéfice de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n’est pas en cessation des paiements ».
CONTRATS COMMERCIAUX
Exception de nullité et exécution partielle(Cass. civ. 2ème, 4 décembre 2008, pourvoi n°07-20.717)
On le sait, si l’exception de nullité est perpétuelle, elle peut seulement jouer pour faire échec à la demande d’exécution d’un acte juridique qui n’a as encore été exécutée. Autrement dit, le défendeur auquel le cocontractant réclame en justice l’exécution forcée d’une convention nulle ne peut pas lui opposer l’exception de nullité s’il a exécuté partiellement l’acte.
Qu’en est-il lorsque le contrat a bien reçu un début d’exécution mais que l’action en nullité n’est pas prescrite ? Le défendeur peut-il faire jouer l’exception de nullité ?
La Cour de cassation répond par l’affirmative dans un litige de droit des assurances. En l’espèce, l’assuré demandait à ce que l’assureur l’indemnise au titre d’une police multirisques des garagistes. Pour s’y opposer, l’assureur a invoqué la nullité du contrat, reprochant à son assuré d’avoir fait intentionnellement de fausses déclarations. Les premiers juges ayant accueilli l’argument de l’assureur et condamné l’assuré à restituer ce qu’il avait perçu, ce dernier soutenait « qu’en faisant droit à l’exception de nullité de police d’assurance soulevée par l’assureur (alors que) le contrat d’assurances avait été en partie exécutée, la cour d’appel a violé l’article L. 113-8 du code des assurances ». Le pourvoi est rejeté aux motifs que « la nullité fondée sur les dispositions de l’article L.113-8 du code des assurances, peut être soulevée par voie d’exception pendant le délai de la prescription biennale nonobstant l’exécution du contrat d’assurance ».
Nouvelle illustration de l’interprétation restrictive des clauses de non concurrence(Cass. com., 2 décembre 2008, pourvoi n°07-17.521)
Cette décision de la chambre commerciale de la Cour de cassation fournit une nouvelle illustration de l’interprétation stricte par les tribunaux des clauses de non concurrence, justifiée par le principe de la liberté d’entreprendre.
En l’espèce, la clause interdisait au débiteur de l’obligation de non concurrence d’apporter son concours directement ou par personne interposée dans le domaine scientifique à des entreprises susceptibles de concurrencer son ancienne société.
Il était reproché au débiteur d’avoir violé ladite clause en souscrivant au capital d’une société concurrente. Débouté par les juges du fond, le créancier de l’obligation a formé un pourvoi qui fut rejeté par la Cour de cassation. Cette dernière a estimé que la cour d’appel a interprété souverainement les termes ambigus de cette clause en considérant que le seul fait de devenir actionnaire d’une société concurrente ne constituait pas, en lui même et compte tenu du contexte dans lequel il était intervenu, une violation de la clause de non concurrence.
Résolution du contrat de prêt, faute de la banque et restitution des fonds(Cass. civ. 1ère, 13 novembre 2008, pourvoi n°07-16.898)
En exécution d’un contrat de prêt à la consommation, une banque avait directement versé les fonds au vendeur. Ce dernier n’ayant pas rempli ses obligations, les juges ont prononcé la résiliation du contrat de vente et du contrat de crédit accessoire, conformément à l’article L.311-21 du code de la consommation.
En revanche, la banque fût déboutée de ses demandes dirigées contre le vendeur tendant à obtenir sa condamnation à la rembourser du solde du prêt qui lui avait été versé et à la garantir des condamnations prononcées contre elle au profit des emprunteurs aux motifs qu’elle ne pouvait s’exonérer de sa responsabilité dans le déblocage des fonds au vu d’un « reçu de fin de travaux » ni signé ni daté. L’arrêt est cassé. Selon la Haute juridiction, le déblocage prématuré et imprudent des fonds n’est pas de nature à faire obstacle à leur restitution consécutive à la résolution du prêt et doit conduire à l’appréciation des fautes respectives du vendeur et du prêteur ayant concouru à la réalisation du préjudice.
FRANCHISE
Contrat de franchise et preuve de la société créée de fait(Cass. civ. 1ère, 3 décembre 2008, pourvoi n°07-13.043)
La question des droits de l’époux ayant participé à l’activité commerciale de son conjoint à percevoir un paiement alimente régulièrement la jurisprudence.
Un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation en est une illustration. En l’espèce, le divorce ayant été prononcé, l’ancienne épouse d’un franchisé avait assigné ce dernier aux fins d’obtenir, à titre principal, la liquidation de la société créée de fait dont elle soutenait l’existence et, à titre subsidiaire, le paiement d’une somme sur le fondement de l’enrichissement sans cause.
Il s’agit de deux fondements classiques en la matière.
La preuve de la société créée de fait suppose la réunion de l’affectio societatis, de la mise en commun d'apports et de la répartition des bénéfices et des pertes. En l’espèce, c’est la preuve de l’affectio societatis qui faisait défaut. La Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir rejeté la demande de l’ancienne épouse du franchisé, au motif que « celle-ci ne démontrait pas l’existence d’une volonté commune des époux de s’associer sur un pied d’égalité en partageant les bénéfices et les pertes dès lors que le compte commercial de l’entreprise n’avait fonctionné que sous la signature de M. X, seul inscrit au registre du commerce et signataire du contrat de franchise (…) ».
PERSONNES ET PATRIMOINE
Droit de visite et consentement des enfants(Cass. civ. 1ère, 3 décembre 2008, pourvoi n°07-19.767)
Par le présent arrêt, la Cour de cassation confirme sa jurisprudence en matière de fixation des modalités d’exercice de l’autorité parentale. En l’espèce, la cour d’appel avait attribué au père de deux enfants un droit de visite « qui s’exercera librement sous réserve de l’accord des enfants ».
Les juges du fond sont sèchement censurés au visa des articles 373-2 et 373-2-8 du code civil.
Très logiquement il faut bien le dire, la Cour de cassation infirme l’arrêt d’appel pour violation de la loi. Elle considère que « les juges, lorsqu’ils fixent les modalités d’exercice de l’autorité parentale d’un parent à l’égard de ses enfants, ne peuvent déléguer les pouvoirs que la loi leur confère ».
Ainsi, le juge ne doit pas subordonner l’exécution de sa décision à la volonté des enfants.
Mineurs et majeurs protégés(Décret n°2008-1276 du 5 décembre 2008, JO du 7 décembre 2008)
Sous l’influence de la doctrine, de la jurisprudence de la Cour de cassation et de la Cour européenne des droits de l’homme, mais aussi et surtout de la loi du 5 mars 2007, la protection des mineurs et des majeurs a progressivement évolué d’une protection des intérêts patrimoniaux de la personne vers une protection de la personne elle-même.
Cette loi nécessitait cependant quelques précisions quant à ses conditions d’application.
C’est l’objet du décret du 5 décembre 2008 qui vient détailler, précisément, les règles procédurales. Le décret instaure, entre autres, le principe du contradictoire pour certaines décisions du juge des tutelles et redéfinit les modalités de réunion du conseil de famille.
Ces nouvelles dispositions entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2009 et sont applicables aux procédures en cours.
SOCIAL ET RESSOURCES HUMAINES
Obligation de reclassement : limitation du périmètre des recherches par le salarié(Cass. soc., 13 novembre 2008, pourvoi n°06-46.227)
Selon l’article 1233-4 du code du travail, le licenciement économique d’un salarié ne peut intervenir que si son reclassement est impossible. Les recherches de reclassement doivent être effectuées au niveau des sociétés du groupe, voire même à l’étranger.
Dans cette affaire, l’employeur avait proposé à une salariée un poste que celle-ci avait refusé en soumettant son souhait, pour des raisons familiales, de ne pas s’éloigner de son domicile.
L’employeur avait donc restreint ses recherches au périmètre délimité par la salariée et avait été contraint de la licencier, faute de possibilités de reclassement.
La Cour a considéré que l’employeur, ayant fait des recherches de reclassement dans le périmètre géographique correspondant aux souhaits invoqués par la salariée dont le licenciement est projeté, justifie de l’absence de poste disponible en rapport avec les compétences de l’intéressée et ne manque pas à son obligation de reclassement.
Proposition de loi sur le repos dominical(Proposition de loi n°1254 du 12 novembre 2008)
Le 5 décembre dernier, le gouvernement a déclaré l’urgence sur la proposition de loi visant à définir les dérogations au repos dominical dans les grandes agglomérations, les zones touristiques et les commerces alimentaires, n°1254 déposée le 12 novembre 2008 par Richard MALLIE.
Cette proposition de loi, qui devrait être mise en œuvre au premier trimestre 2009, réaffirme le principe du repos dominical tout en prévoyant la possibilité d’autoriser l’ouverture des magasins le dimanche dans des zones commerciales qui pourront être classées zones d’attractivité commerciale exceptionnelle sur demande des conseils municipaux au sein des agglomérations de plus d’un million d’habitants (Paris, Lyon, Aix-Marseille et Lille). Dans les zones touristiques actuelles, l’emploi des salariés le dimanche est généralisé à tous les commerces de détail.
Plusieurs garanties sont accordées aux salariés. La proposition de loi prévoit le doublement du salaire ainsi que l’octroi d’un repos compensateur, mais garantit également le droit, pour le salarié, de refuser de travailler le dimanche sans craindre une quelconque sanction.
Validation de l’essentiel de la loi sur le financement de la sécurité sociale(Cons. const., 11 décembre 2008, n°2008-571 DC)
Le Conseil constitutionnel a, par décision du 11 décembre 2008, statué sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, censurant 19 des 120 articles de la loi.
Le Conseil a rejeté les griefs dirigés contre l’article 37 qui autorise le directeur de l’UNCAM (Union nationale de caisse d’assurance maladie) à fixer, pour l’année 2009, la part des cotisations prises en charge par les caisses d’assurance maladie, par dérogation à la convention entre l’UNCAM et les syndicats représentatifs des chirurgiens-dentistes.
Le Conseil a également rejeté les griefs contre l’article 90 de la loi qui permet à chaque salarié, s’il le souhaite, de pouvoir retarder son départ à la retraite jusqu’à l’âge de 70 ans.
Le Conseil constitutionnel a estimé que la possibilité de report de la retraite de 65 à 70 ans ne violait pas le préambule de la Constitution et qu’il s’agissait d’un mécanisme volontaire d’activité ne pouvant opérer au-delà de 70 ans et laissant inchangé l’âge légal de la retraite. A compter du 1er janvier 2010, les employeurs ne seront donc plus contraints de mettre à la retraite les salariés de 65 ans.
IMMOBILIER
Prescription et répétition des loyers(Cass. civ. 3ème, 13 novembre 2008, pourvoi n°07-16.221)
La Cour de cassation vient de rappeler les modalités de résolution des conflits de loi dans le temps à l’occasion de l’application de la réforme de la prescription civile issue de la loi du 18 janvier 2005.
En l’espèce, le locataire d’un logement avait formé opposition, en 2006, à une ordonnance d’injonction de payer les loyers et charges dus au bailleur, pour solliciter le remboursement d’une somme indument versée en 1998. Les juges du fond ont débouté le locataire au motif que l’action en répétition des loyers et charges locatives se prescrivait par 5 ans, en application de l’article 2277 du code civil. La demande du locataire était donc prescrite. La Cour de cassation censure les juges du fond, au visa des articles 2 et 2277 du code civil.
Elle estime en effet que « lorsque la loi réduit la durée d’une prescription, la prescription réduite commence à courir, sauf disposition contraire, du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder le délai prévu par la loi antérieure ». On rappellera qu’avant la réforme du 18 janvier 2005, l’action en paiement des loyers et charges se prescrivait par 5 ans alors que l’action en répétition des loyers et charges indument versés, qui relevait du régime des quasi-contrats, se prescrivait par 30 ans.
Désormais, l’action en répétition de l’indu se prescrivant par 5 ans, le délai de prescription ainsi réduit courrait à compter de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, l’action du locataire n’était donc pas prescrite.
Dénégation du statut pour défaut d’immatriculation et bail commercial(CA Paris, 19 novembre 2008, Juris-Data n°07/18623)
La Cour d’appel de Paris vient de préciser le moment jusqu’auquel la dénégation du statut des baux commerciaux peut intervenir. En l’espèce, un preneur avait fait délivrer à son bailleur une demande de renouvellement de bail. Le bailleur a fait signifier son refus de renouvellement avec dénégation du droit au statut pour défaut d’immatriculation du preneur au RCS. Débouté en première instance, le preneur a interjeté appel de la décision au motif notamment que l’acte de dénégation du statut n’avait pas été délivré dans le délai de 3 mois suivant la demande de renouvellement, de sorte que le bail s’était renouvelé.
Le preneur invoquait également la connaissance par le bailleur de l’absence d’immatriculation avant la demande de renouvellement, sans pour autant s’en prévaloir. La Cour d’appel a débouté le preneur au motif que « l’acte de dénégation lui-même peut intervenir tant que le bail n’est pas définitivement renouvelé en tous ses éléments, comprenant le montant du loyer ». La décision ne peut être qu’approuvée dès lors que l’immatriculation au RCS est une condition fondamentale pour le renouvellement du bail, la connaissance de l’absence d’immatriculation du preneur par le bailleur est, à cet égard, indifférente.
Congé pour reprise et habitation effective du bénéficiaire(Cass. civ. 3ème, 13 novembre 2008, pourvoi n°05-19.722)
La Cour de cassation vient de réaffirmer le principe selon lequel un congé-reprise pour habiter, délivré en application de l’article 15 I de la loi du 6 juillet 1989, suppose que le logement repris constitue l’habitation principale du bénéficiaire. En l’espèce, un bailleur avait fait délivrer à sa locataire un congé-reprise au bénéfice de sa belle-mère. La locataire avait assigné le bailleur en paiement de dommages et intérêts pour congé frauduleux. Le bailleur a fait valoir que sa belle-mère occupait le logement à temps partiel.
Elle nécessitait, en effet, une surveillance continue et alternait les séjours auprès de ses enfants. La Cour d’appel, qui avait estimé que la reprise du bailleur devait pouvoir s’exercer lorsqu’il s’agissait de reloger, même à titre partiel, un membre de sa famille qui a temporairement la nécessité d’habiter dans les lieux repris, voit son arrêt censuré au motif qu’elle n’avait pas recherché si le logement repris constituait l’habitation principale du bénéficiaire de la reprise.
PROCÉDURE CIVILE ET VOIES D’EXÉCUTION
Recours contre les ordonnances du conseiller de la mise en état(Cass. civ. 2ème, 18 décembre 2008 et 19 novembre 2008, pourvois n°08-11.103 et n°07-12.523)
Les pouvoirs du conseiller de la mise en état et le régime de ses ordonnances continuent d’alimenter les pourvois en cassation.
L’article 914 du code de procédure civile prévoit que les ordonnances du conseiller de la mise en état ne sont susceptibles d’aucun recours indépendamment de l’arrêt sur le fond (alinéa 1er). Toutefois, par dérogation à cette règle, leur déféré est possible, par simple requête à la cour dans les quinze jours de leur date, notamment lorsque l’ordonnance a pour effet de mettre fin à l’instance, lorsqu’elle constate son extinction, lorsqu’elle statue sur une exception de procédure ou un incident mettant fin à l’instance (alinéa 2).
Dans le premier arrêt, la Cour de cassation confirme son avis rendu le 2 avril 2007 en énonçant que les incidents mettant fin à l’instance sont ceux mentionnés aux articles 384 et 385 du code de procédure civile et n’incluent pas les fins de non-recevoir. Elle en déduit que le délai de saisine de la cour de renvoi prévu par l’article 1034 du même code étant, non un délai de préemption mais un délai de forclusion dont la sanction est soumise au régime des fins de non-recevoir, la cour d’appel, en sa formation collégiale, est compétente pour réexaminer la contestation sur la recevabilité rejetée par la conseiller de la mise en état.
Le second arrêt posait la question de savoir si, en l’état de ces dispositions, l’ordonnance du conseiller de la mise en état qui déclare l’appel recevable est susceptible d’être déférée à la cour d’appel. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation a répondu par la négative. Elle a considéré que l’ordonnance du conseiller de la mise en état n’ayant pas eu pour effet de mettre fin à l’instance, elle n’est susceptible d’aucun recours immédiat.
Le dépôt de conclusions interrompt le délai de forclusion dans les procédures orales(Cass. civ. 2ème, 13 novembre 2008, pourvoi n°06-21.745)
« En matière de procédure orale, des conclusions reconventionnelles déposées à l’audience par une partie présente ou représentée interrompent, à leur date, la prescription, dès lors que cette partie ou son représentant a comparu et les a reprises oralement lors de l’audience de plaidoirie ultérieure, peu important que la partie adverse n’ait pas elle-même comparu lors de l’audience à laquelle elles ont été déposées ».
Telle est l’enseignement de l’arrêt commenté. La Cour de cassation en déduit que les établissements financiers ayant déposé, antérieurement au délai de forclusion de l’article L.311-37 du code de la consommation, des conclusions reconventionnelles en paiement dirigées contre les emprunteurs, ne sont pas forclos, même si l’audience des plaidoiries a eu lieu postérieurement, dès lors que les conclusions ont été reprises oralement.
Sanction procédurale de la désignation de la société demanderesse sous son nom commercial(Cass. civ. 2ème, 11 décembre 2008, pourvoi n°07-18.511)
Quelle est l’irrégularité affectant l’assignation délivrée par une société étrangère, indiquant son numéro d’immatriculation, mais se présentant sous son nom commercial en donnant pour adresse celle de son principal établissement en France ? Telle était la question posée à la Cour de cassation dans cette affaire. De manière contestable, la Cour d’appel a estimé que l’assignation avait été délivrée par une société dépourvue d’existence, ce qui constituait une irrégularité de fond entraînant la nullité de l’assignation et du jugement rendu.
Elle est censurée par la Haute juridiction qui a estimé que la circonstance qu’une société se présente sous son nom commercial ne la prive pas de la capacité d’ester en justice qui est attachée à la personne quelle que soit sa désignation et ne constitue qu’une irrégularité de forme.
PROPRIETE ARTISTIQUE ET INDUSTRIELLE
Les œuvres protégées par le droit d’auteur : le cas des œuvres conceptuelles(Cass. civ. 1ère, 13 novembre 2008, pourvoi n°06-19.021)
Le droit d’auteur appréhende des œuvres de nature diverse comme l’autorise l’article L.112-1 du code de la propriété intellectuelle aux termes duquel « les dispositions du présent code protègent les droits des auteurs sur toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination », ce qu’illustre l’arrêt commenté.
L’espèce concernait l’auteur d’une œuvre qui avait apposé le mot « Paradis » au dessus de la porte des toilettes du dortoir des alcooliques d’un hôpital psychiatrique pour une exposition organisée au sein de l’hôpital. Constatant que son œuvre avait été photographiée, puis utilisée à l’occasion d’une exposition et éditée dans un ouvrage, l’auteur intenta une action en contrefaçon, accueillie par la cour d’appel.
On sait que les créations accèdent au rang d’œuvre protégée, et leur auteur bénéficie des dispositions protectrices du code de la propriété intellectuelle, dès lors qu’elles se sont suffisamment matérialisées pour dépasser le stade d’idée, et qu’elles présentent une originalité définie comme l’empreinte de la personnalité de leur auteur. Telles sont les conditions qui étaient réunies en l’espèce.
En effet, la Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir retenu que l’œuvre relevait du domaine du droit d’auteur en raison des choix esthétiques de l’auteur qui a apposé un mot en lettres dorées avec effet de patine et dans un graphisme particulier, sur une porte vétuste, à la serrure en forme de croix, encastrée dans un mur décrépi dont la peinture s’écaille, et relève que « l’approche conceptuelle de l’artiste, qui consiste à apposer un mot dans un lieu particulier en le détournant de son sens commun, s’était formellement exprimée dans une réalisation matérielle originale ».
C’est logiquement que la contrefaçon est retenue en raison de la reproduction, de la représentation et de la diffusion de l’œuvre sans l’autorisation de son auteur et ce, indépendamment de la bonne ou de la mauvaise foi.
Si le présent arrêt ne bouleverse pas les règles relatives au domaine du droit d’auteur, il présente l’intérêt d’intervenir dans une affaire qui avait agité les milieux concernés, principalement les amateurs d’art contemporain, relativement à une œuvre d’art conceptuelle qu’il place sur le même plan que les œuvres « classiques ».
Contrefaçon et action du distributeur(Cass. com., 2 décembre 2008, pourvoi n°08-11.699)
L’action en contrefaçon est exercée par le titulaire des droits patrimoniaux. Toutefois, d’autres personnes, dont notamment les distributeurs, peuvent être victimes des actes de contrefaçon et se pose alors la question des voies dont elles disposent pour obtenir réparation du préjudice subi. Faute de disposer d’un droit privatif, les personnes non titulaires des droits patrimoniaux peuvent néanmoins agir sur le terrain de la concurrence déloyale ou parasitaire ainsi que l’illustre l’arrêt commenté.
L’espèce concernait l’action du distributeur de sacs Longchamp, victimes des actes de contrefaçon dudit modèle. Le distributeur engagea alors une action contre le contrefacteur sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire.
La cour d’appel rejeta l’action au motif que le risque de confusion n’était pas établi, pas davantage que la volonté de tirer profit de la notoriété de la marque Longchamp.
La Cour de cassation rejette le pourvoi formé contre l’arrêt de la cour d’appel au motif que, contrairement à l’argument soutenu, la cour d’appel n’a pas dénié au demandeur la faculté d’invoquer des faits par ailleurs constitutifs de la contrefaçon et invoqués au soutien de l’action en contrefaçon exercée par le titulaire des droits patrimoniaux.
En effet, l’action exercée par le distributeur est, en l’espèce, rejetée faute pour lui d’établir la faute du contrefacteur, à savoir un risque de confusion ou la volonté de tirer indûment profit de la notoriété de la marque Longchamp.
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