Dossiers de la franchise
Franchise : les nouveautés juridiques en 2019
Le Droit Commercial est en perpétuelle évolution, de même que la franchise. Voici les principales nouveautés, issues de décisions rendues récemment par la justice. Celles-ci portent sur la nécessité d’exploiter un pilote, sur les spécificités de la multi-franchise et sur l’image de marque.
A propos de la protection de l’image d’une enseigne : l’exemple d’Eléphant Bleu
Certaines marques sont devenues tellement emblématiques qu’elles sont passées dans le langage courant et leurs signes distinctifs, même rappelés de manière discrète, interpellent irrémédiablement les consommateurs et les rassurent dans le même temps. C’est le cas du réseau Eléphant Bleu, qui exploite le plus grand parc de centres dédiés au lavage haute-pression des véhicules avec près de 500 unités en activité.
Notre histoire commence en 2003, année où la société Veydis signe un contrat de franchise avec Hypromat France (maison-mère d’Eléphant Bleu) afin d’ouvrir un point de vente. Au terme de l’accord en 2006, le contrat n’est pas reconduit et l’ancien franchisé cède son fonds de commerce en 2007 à une nouvelle société, répondant au nom de Julman, qui s’engage alors à faire disparaître tout signe rappelant la charge graphique d’Eléphant Bleu au plus tard le 15 mai 2007.
Hypromat mat par la suite en cause successivement Veydis (finalement liquidée) puis son repreneur Julman, car jusqu’en 2010, l’esthétique générale de la station rappelait fortement la charte graphique d’Eléphant Bleu.
En 2017, si la Cour d’Appel de Colmar constate la faute de Julman, sans toutefois donner suite aux demandes d’indemnisation d’Eléphant Bleu, pour défaut de preuve d’un préjudice quelconque et également en raison du délai entre la clôture du contrat de franchise initial et les premières assignations en justice.
Mais début 2019, un ultime rebondissement donne raison à Eléphant Bleu, car selon la Cour de Cassation, le fait même d’utiliser les codes couleur de la marque constitue un préjudice et d’autre part, le droit à la réparation démarre non pas lorsque les premières mises en demeure sont adressées, mais bien à la date du dommage constaté.
Référence : Cour de Cassation, 20 février 2019 (n° 17-20.652)
Quelles conséquences en cas de fin de contrat d’un multi-franchisé ?
La Cour d’Appel de Paris a rendu en début d’année 2019 un arrêt étudié de très près par l’ensemble des réseaux. En l’espèce, un multi-franchisé exploitant plusieurs magasins pour une seule et même enseigne, a décidé de ne pas renouveler son contrat de franchise, tout en restant exploitant des points de vente qu’il détenait. Il a alors rhabillé ses anciens points de vente sous de nouvelles couleurs originales et a de facto créé un nouveau réseau, qui plus est dans le même secteur d’activité. Le franchiseur a alors saisi la justice, estimant que le franchisé dérogeait à son obligation de ne pas créer de réseau concurrent. Mais aux yeux du droit, cela ne constituait en réalité en aucun cas une infraction, car les boutiques en question n’étaient pas organisées sous forme de franchise et qu’elles n’étaient pas soumises aux obligations qu’on trouve dans le monde du commerce en réseau. Le fait que deux de ces points de vente soient dirigés par d’anciens franchisés n’était pas non plus un élément suffisant pour condamner le dirigeant indépendant.
Il faut tout de même noter que l’ex-franchisé en question, même s’il a gagné sur le fond, a tout de même été contraint de verser la somme de 300 000 € à son ancien franchiseur. De quoi faire réfléchir, alors qu’en 2015, la loi Macron a indiqué que non seulement, une clause de non-concurrence doit être circonscrite sur une zone géographique et sur une période donnée (un an généralement) mais elle doit aussi garantir le fait que celle-ci doit servir à préserver le savoir faire du franchiseur, dans tout ce qu’il comporte de plus spécifique et secret.
Référence : Cour d’Appel de Paris, Pôle 5, 23 janvier 2019 (n° 16/15238)
Le franchiseur est-il tenu de prouver la rentabilité de son concept via un pilote ?
Même si chaque point de vente est par nature différent, il n’en reste pas moins vrai que dans le cadre d’un contrat de franchise, un contrat est passé en vertu duquel un entrepreneur obtient le droit de reproduire à l’identique un concept, afin d’en dupliquer le succès sur son territoire. Cela implique-t-il nécessairement une expérience réussie au sein d’un magasin-pilote, sur une durée suffisante pour apprécier les chances de réussite ?
C’est ce que semble indiquer un récent arrêt rendu par la Cour d’Appel de Paris, qui indique que la tête de réseau doit pouvoir apporter la preuve du succès de son concept à son franchisé, que ce soit via les résultats d’un site pilote ou par tout autre moyen.
Dans le texte, on peut lire que « l'exploitation en propre d'un site pilote au début puis tout au long de l'existence du réseau ne constitue ni une obligation légale, ni en l'espèce, contractuelle, la seule obligation pesant sur le franchiseur étant d'avoir éprouvé et expérimenté son savoir-faire, avec succès ».
On voit donc bien qu’un magasin-pilote n’est pas obligatoirement requis : cette absence n’est pas suffisante pour rendre la transmission du savoir faire caduque. Cela se vérifie lorsqu’une master franchise se lance dans un pays inédit sans avoir testé la rentabilité sur le nouveau territoire à l’aide d’un point de vente en propre. De même, si l’on reste en France, un franchiseur a tout-à-fait le droit de fermer son magasin-pilote une fois que son réseau est bien sur les rails, et qu’il souhaite que son enseigne soit composée exclusivement de franchises.
Plus que l’existence ou non d’un pilote, c’est surtout la rentabilité de l’ensemble des magasins qui doit être avérée, car il faut absolument s’appuyer sur des bases solides avant de faire monter des franchisés à bord.
De même, si des difficultés d’ordre financières, même passagères, ont eu lieu sur tel ou tel point de vente, le franchiseur doit en tenir informé les candidats frappant à sa porte. En cas de manquement à ce devoir d’information, la justice pourra déclarer nul le contrat de franchise si un conflit devait voir le jour.
Référence : Cour d’Appel de Paris Paris, Pôle 5, chambre 4, 9 Janvier 2019 (n° 16/21425)
De quoi rassurer les réseaux de franchise, qui souhaitent avant tout protéger leur marque et leurs signes distinctifs et par ce biais, assurer à leurs franchisés une réelle exclusivité.
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