Opali : Tribune de Bruno Cahuzac, fondateur de l'enseigne, sur l'application de la nouvelle convention collective pour les réseaux de services à la personne
« Depuis la mise en place du plan Borloo en 2005, ouvrant aux entreprises le marché des services à la personne, de nombreux réseaux de franchise se sont développés avec succès. Cependant, les pouvoirs publics n’ont pas légiféré sur les nécessaires adaptations du droit du travail à ce secteur d’activité.
Certains réseaux ont réagi en faisant preuve « d’innovations juridiques » qui se sont souvent révélées malheureuses. Les contrats CDI, à temps partiel choisi, ou certaines formes de contrats CDD saisonniers en sont les parfaits exemples.
Ces improvisations et la nécessité d’appliquer stricto sensu le droit commun, ont fragilisé certains réseaux par la multiplication des contentieux aux conseils des prud’hommes. L’issue quasi défavorable aux employeurs, associée de dommages et intérêts importants, a rendu parfois impossible la poursuite d’une activité. Depuis peu, les réseaux fonctionnant en mode prestataire (la grande majorité des intervenants des services à la personne) ont une convention collective homologuée par les pouvoirs publics permettant à ce secteur de bénéficier d’un cadre sécurisé.
Le franchiseur n’a que 7 mois pour s’adapter…
Quel doit être le rôle du franchiseur vis-à-vis de ses franchisés dans ce nouveau contexte ? Le législateur a laissé 7 mois aux entreprises, soit jusqu’au 1er novembre 2014, pour mettre en place la nouvelle convention collective et de nombreuses adaptations sur les logiciels de paie. C’est évidemment au franchiseur de les organiser et de les fiabiliser. Toutefois, sa mission ne peut se limiter à un rôle de gestionnaire de paie. Il doit également apporter son analyse sur les emplois repères (définis précisément par la convention collective) et la mise en place de la grille de classification. En effet, la nouvelle convention collective impose un descriptif des emplois les plus représentatifs des métiers des services à la personne et une grille salariale correspondante. Il reste donc à clarifier au sein des réseaux, si les missions des salariés correspondent bien à un emploi repère et à en tirer des conclusions sur le niveau de rémunération des intervenants et les incidences sur les marges. Toutefois, la décision finale portant sur l’évolution de la masse salariale doit revenir au franchisé.
Et… former et informer ses franchisés
Le franchiseur doit aussi apporter une compétence spécifique pour la mise en application du modèle juridique de son réseau. La récente constitution d’une commission paritaire mixte de branche permet l’établissement d’accords d’entreprises, seule solution pour un modèle juridique sécurisé et fiable des entreprises des services à la personne. La mise en place et la gestion d’accords d’entreprises sur la modulation du temps de travail favorisant le temps partiel, relève d’un vrai savoir-faire. Le franchiseur se doit de fournir une procédure à suivre, au franchisé, et de le former à la négociation et à l’instauration d’un dialogue social au sein de son entreprise, aussi petite soit-elle, afin que ces accords puissent éclore. L’application de ce type d’accord nécessite la mise en place d’un système de gestion informatisé complexe, que le franchiseur doit maîtriser, notamment pour garantir une maîtrise sereine et efficace de la marge. Enfin, le franchiseur doit modifier ses modèles de contrats de travail afin qu’ils soient conformes aux mentions obligatoires exigées par la nouvelle convention collective. Il doit notamment rédiger des clauses rappelant la notion d’employeur légitime, c'est-à-dire indiquer clairement que l’employeur est l’entreprise de services à la personne et non le client, afin d’éviter tous risques de confusion entre les modes « mandataire » et « prestataire ». Le secteur géographique d’intervention doit être clairement défini et mentionné, les plages d’indisponibilité du salarié impérativement indiquées.
De son côté, dans l’exercice de son métier, le franchisé doit savoir qu’un accord d’entreprise sur la modulation du temps de travail mal appliqué et/ou mal suivi, peut générer une dérive du coût social. C’est déterminant pour la rentabilité d’une entreprise de services à la personne. L’entrepreneur doit être beaucoup plus vigilant sur la gestion de la paie. Malgré les augmentations de coûts de gestion qu’elle va générer, cette convention collective pour les entreprises de services à la personne est une bonne nouvelle pour les acteurs du secteur qui sauront renforcer leurs compétences en droit social et gérer le dialogue social. »
Bruno Cahuzac, Fondateur d’Opali